Mr Christian Degauquier, Maraîcher

Expliquez le déroulement du début à la fin du marché ?

Premièrement, je charge la marchandise de la chambre froide au véhicule. Une fois chargée, je pars en direction du marché. Arrivé sur place, je bois un café bien corsé histoire de me réveiller. Ensuite, j'installe le matériel, il faut ouvrir le parasol, monter les tables et mettre les nappes, fixer les plexis glass, disposer la balance ainsi que la marchandise. A 12h30, on commence à remballer le tout, pour pouvoir libérer les rues à 13h30. Si nous ne quittons pas l'emplacement à temps, il est risqué de se faire attribuer un pv. L'amande peut s'élever jusqu'à +/- 200 €.

Au retour, nous devons ranger le matériel, mettre la marchandise dans la chambre froide et nettoyer les ustensiles.

Quels sont vos horaires en général ?

+/- 5h30 à 14h00 lorsque c'est un marché normal. Par contre, lors d'une braderie ou d'une foire cela varie et couvre une plage horaire de +/- 4h00 à 22h00. Ces jours spéciaux n'ont pas un horaire facile mais ils représentent ceux où normalement nous augmentons nos bénéfices.

Pourriez-vous décrire l'ambiance, l'atmosphère du marché ?

L'ambiance est tendue en hiver car nos bénéfices baissent en cette période de l'année. La raison majeure est que par temps glacial les gens ne sortent pas de chez eux. Par conséquent, certains maraîchers sont plus "tendus, stressés, moins chaleureux". Ce travail devient dès lors une rentabilisation nécessaire, le plaisir à exercer ce métier étant moins présent à cette époque.

Comment se déroule le contact avec les clients ?

Les clients sont de plus en plus froids et distants. On ne ressent plus beaucoup la chaleur d'antan. La convivialité se fait rare. Cependant, être maraîcher, c'est ma passion avant tout. J'ai effectué une sélection parmi ma clientèle ; les gens qui me manque de respect ou qui ne me disent pas bonjour, je ne les sers plus. Je n'ai gardé que les personnes respectueuses pour ainsi les choyer dans les meilleures conditions.

Avez-vous créé des liens amicaux avec vos clients ?

Oui assez souvent. Il m'est d'ailleurs arrivé de me faire inviter à souper par des clients. Pour tout vous dire, j'ai rencontré ma compagne sur un marché. Et aujourd'hui, je suis devenu le plus heureux des papas grâce à cette compagne.

Comment avez-vous débuté dans ce métier ? En quelle année ? Quelles en ont été les contraintes ?

Au départ, j'ai débuté en tant que carrosier. Malheureusement, des problèmes de santé ont fait surface dans le cadre de ce travail. En 1991, j'ai changé de voie. J'ai échangé ma clé à molette contre un grand couteau de fromager. J'ai démarré de rien ; malgré tout c'est devenu ma passion.

Les contraintes sont multiples. Les inspecteurs de denrées alimentaires sont très exigeants et ils nous obligent à faire de gros investissements. C'est difficile de débuter sans fond. Ensuite, il ne faut pas négliger une rude concurrence.

Quels sont les avantages et les inconvénients de ce métier ?

Avantage(s) : par goût de liberté, le fait de ne pas avoir de patron derrière moi est un atout. Je peux aller chercher ma clientèle partout en Belgique ainsi que prendre congé lorsque j'en ai envie. De plus, être toujours en plein air m'est agréable. 

Inconvénient(s) : j'en relèverai trois majeurs : les intempéries qui mettent nos bénéfices en difficultés, les taxes élevées et les banques qui ne nous ouvrent pas volontiers leur porte pour nous accorder des prêts. Pour en revenir aux taxes, le minimum de cotisation sociale est de +/- 400 € par trimestre et ce, dans le but de prévoir une pension. Néanmoins, celle-ci est la plupart du temps beaucoup plus élevée car elle est calculée au prorata du chiffre d'affaire. Pensionné, on touche une somme de +/- 400 € par mois, ce qui selon moi est minime.

Selon vous, quelles sont les qualités requises pour être un bon vendeur ?

Un des éléments importants d'un bon vendeur est la propreté sur soi ainsi qu'une hygiène irréprochable du matériel et des différents ustensiles. Pour approcher plus facilement le client, le sourire et la bonne humeur sont recommandés. Attirer le client est un des facteurs à retenir. C'est pourquoi, il est important de ne pas négliger la présentation de son échoppe. Enfin, avoir un peu d'humour ne fait de tort à personne.

Que ne faut-il surtout pas faire ?

Ne pas respecter les règles d'hygiène, être vulgaire ou pis, être raciste.

Y a-t-il beaucoup de concurrence ? Comment se démarquer par rapport à celle-ci ?

Il y a énormément de concurrence. Il est impératif de se démarquer sinon votre affaire piquera du nez. Pour cela, il faut trouver des produits de qualités que les autres n'ont pas. On doit toujours être à la recherche de nouveaux produits ; on est souvent amené à parcourir de multiples régions ainsi que différents pays (ex : France, Thaïlande, etc.)

Offrir de temps à autre un petit cadeau à sa clientèle (ex : une petite briquette de fromage, arrondir le prix, etc.).

L'hiver est donc une période pénible, comment fait-on pour y survivre ?

Pour éviter la faillite, une bonne gestion est obligatoire. Nous devons bien penser à remplir le congélateur avant l'hiver et mettre de côté trois mois de loyers à l'avance.

Quel est le prix d'un emplacement en moyenne ?

La différence de prix entre un abonné et un volant est mince.

Pour l'abonné, il faut compter +/- 6 € pour un mètre, tandis que pour le volant le coût sera de +/- 6.50 € le mètre.

Ces prix varient évidemment d'un endroit à un autre, mais également en fonction du fait qu'il s'agit d'une foire ou d'une braderie.

Pourriez-vous donner plusieurs conseils pour des personnes qui veulent se lancer dans ce métier ?

Je dirais à ces personnes d’être courageuses, de ne pas confondre recettes et bénéfices, de mettre de côté et de posséder toutes les qualités que j'ai citées avant.

D'après vous, est-ce un métier d'avenir ?

Personnellement, je pense que c'est un métier d'avenir. Cependant, il faut se battre énormément, ne pas baisser les bras trop vite mais aussi y consacrer beaucoup de temps et d'argent.

Avez-vous ressenti des changements depuis vos débuts ?

Non pas vraiment, si ce n'est dans l'attitude des clients. Ils sont un peu moins conviviaux qu'auparavant.

Quelle est votre plus grande crainte dans l'exercice de ce métier ?

Un jour, j'ai rêvé que mon hangar était envahi de souris et qu'il avait fallu jeter la totalité de ma marchandise car elle était contaminée.

On entend souvent les maraîchers lancer des expressions amusantes. En avez- vous une aussi ?

C'est une expression de tous les jours pour donner le sourire à mes clients : "5 balles et j'l'emballe". Traduction : vous me donnez 5 € et je vous emballe votre marchandise. Evidemment, cela varie selon les prix.

Avez-vous un petit truc pour vous réchauffer l'hiver, tant bien que mal ?

Un petit café cognac.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.