Mr Didier Henroz,
Illustrateur - Caricaturiste

Interview réalisée en mai 2013

Pourriez-vous retracer votre parcours scolaire, vos débuts professionnels ?

J’ai eu un parcours scolaire en deux temps : les secondaires traditionnelles (latines et modernes), jusqu’à mes 15 ans. Là, j’ai bifurqué vers le artistiques à l’Institut Saint-Luc à Bruxelles. J’ai poursuivi en supérieur, un cycle court de 3 ans avec une spécialisation bande dessinée. 

Les débuts professionnels ne furent pas simples. Le milieu de la BD était en pleine crise et ne misait que sur des noms connus. Quelques amis et moi avons alors décidé de créer notre propre fanzine pour être publiés. Après plusieurs années d’investissement dans ce projet, n’ayant toujours pas réussi à faire le moindre bénéfice, je me suis orienté vers l’illustration publicitaire. 

Qu’est-ce qui vous a attiré dans le dessin ?

J’ai toujours dessiné. C’est pour moi un moyen d’expression aussi efficace, si pas plus, que les mots. Et cela représentait la liberté de faire ce que j’avais toujours eu envie de faire. 

En quoi consiste concrètement votre travail d’illustrateur ?

Je partage mon temps, +/- 50-50, entre la caricature en événement et l’illustration, les cartoons et BD personnalisées. J’utilise toujours mes bons marqueurs pour mes encrages. Les dessins ne sont mis au net qu’après envoi du crayonné au client pour accord. Dès l’encrage fini, s’il y a lieu, un ami se charge de la mise en couleurs au Mac. 

Les débouchés sont multiples. Il n’y a pas un domaine d’activité qui n’est pas susceptible d’avoir besoin d’illustrations un jour. Dès lors, un bon site internet doublé d’une prospection quasi permanente, permettent de trouver régulièrement  de nouveaux clients. 

Vous êtes également caricaturiste et “cartooniste“. Pourriez-vous nous expliquer en quoi cela consiste ?

Le métier de caricaturiste événementiel consiste à se rendre sur les lieux de réceptions, de fêtes de société ou de tout événement et de caricaturer les personnes présentes qui le désirent, afin qu’elles repartent de là avec un souvenir humoristique et inoubliable. Les dessins étant souvent conservés, voire encadrés, les retombées sont importantes pour notre clientèle. Les personnes ayant été dessinées se souvenant précisément dans quel contexte la caricature a été réalisée et lors de quelle invitation. 

Le cartoon consiste, lui, à trouver une illustration humoristique pour appuyer des textes. Il est fort utilisé pour des textes assez abstraits ou difficilement illustrables par un document photographique et sert souvent à symboliser en un dessin, un courant de pensée ou une idée qui nécessite plusieurs pages de textes pour être expliquée. 

Vous réalisez également des bandes dessinées, des étiquettes de vin, des logos, des layouts, etc. Est-ce important pour vous de vous diversifier, de toucher à différentes choses ?

C’est indispensable. La diversification permet, lors des premiers contacts avec un client, de le voir intéressé par une des facettes de tout ce que je lui propose. L’époque voulant aussi que les choses doivent changer tout le temps, le client sera intéressé par après par d’autres choses proposées sur le site. 

Pour qui travaillez-vous ? Travail à la commande ou selon votre inspiration ?

Je travaille presque uniquement à la commande. J’ai quelques projets personnels que je développerai un jour, mais le temps me manque souvent. Le fait de dessiner tout le temps me pousse aussi vers d’autres centres d’intérêts dès que j’ai un peu de loisirs. Mes projets personnels sont alors remis à plus tard.

Ma clientèle vient de tous les milieux. J’ai bien sûr des agents artistiques qui font régulièrement appel à moi, mais je travaille aussi avec le milieu bancaire, les assurances, les concessionnaires de voitures, le pharmaceutique, l’informatique, la maintenance, les grands hôtels, les traiteurs, bref tous les milieux possibles et imaginables. 

Avec quelles techniques travaillez-vous ?

Je travaille toujours à l’ancienne. Porte-mine, marqueurs AD et feuilles de carton ou de layout pour les illustrations. Papier à dessin et crayon grafite pour les caricatures. 

Quel est votre statut ?

Cela fait presque 30 ans que j’ai un statut d’indépendant. 

Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?

La principale difficulté est le côté cyclique de certains travaux. Surtout depuis que l’événementiel est en crise, la caricature ne fonctionne plus qu’à certains moments de l’année. Il faut donc pouvoir trouver d’autres occupations pour ces moments-là. D’où l’intérêt de proposer des services diversifiés. Le manque d’argent de la clientèle oblige souvent à revoir ses devis à la baisse. Chaque année, je dois travailler un peu plus pour le même prix. Il y a aussi, hélas de plus en plus souvent, des clients qui tombent en faillite en vous laissant  une « ardoise » que vous ne récupérerez jamais. 

Avez-vous déjà été censuré ?

Cela m’est déjà arrivé. Rarement. C’est pour cela, et pour être sûr de ne pas devoir recommencer mes dessins, que je propose toujours au préalable plusieurs pistes crayonnées avant de m’attaquer à la mise au net d’une illustration. 

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui veut se lancer ?

Si c’est dans la caricature, avoir une bonne santé, ne pas avoir peur de travailler quasiment jour, nuit et week-ends à certains moments de l’année, et surtout un entourage compréhensif. Car très souvent, on part travailler quand les autres reviennent du boulot ou de l’école ! Pour l’illustration, beaucoup de courage et l’acceptation de remise en question permanente.  

Une anecdote ?

Travaillant au Château Solvay lors d’un événement pour une firme d’électroménager qui n’avait invité que des Japonais, j’ai eu un de mes modèles qui m’a faussé compagnie. N’ayant pas envie de le chercher dans la foule, j’ai continué la caricature avec le bas du visage d’un autre Japonais. Le dessin était vraiment très bien et le client ravi ! Les invités se ressemblant tous tellement, jusqu’à leur habillement, j’ai vraiment eu l’impression ce soir-là d’avoir caricaturé la même personne durant trois heures !

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.