Mr Franck Defays, Footballeur

Interview réalisée en décembre 2008

Vous souvenez-vous de votre premier match en division 1 ?

Oui tout à fait. C’était en 1999 et nous jouions contre le KV Mechelen. J’avais joué tout le match. Malgré la défaite (2-1), cela reste un grand souvenir.

Quels clubs avez-vous fréquentés depuis vos débuts ?

J’ai débuté à six ans à la RES Jambes. J’y suis resté de 1980 à 1988. Ensuite, j’ai joué à l’UR Namur jusqu’en 1999, année où j’ai rejoint le Royal Charleroi Sporting Club.

Rêviez-vous, étant jeune, de devenir footballeur professionnel ?

Comme tout jeune passionné par ce sport, je rêvais moi aussi d’embrasser une carrière professionnelle. Jouer en division 1 était le "must". Cette chance s’est présentée au moment où je ne m’y attendais plus. Certes, âgé de 20 ans, j’étais courtisé par le Sporting de Charleroi qui me voulait déjà mais, pour des raisons que j’ignore encore, la transaction n’a pas pu se faire et je suis alors resté en division 3 à Namur. J’ai bien eu des contacts avec d’autres cercles de division 1 mais aucun n’a abouti à quelque chose de concret. Le Sporting carolo est revenu à la charge quand j’avais 25 ans. Et cette fois, tout s’est mis en place. Je n’ai pas hésité un seul instant à signer. Mon rêve se réalisait : je pouvais enfin passer pro !

Quand vous jouiez à Namur, quel statut aviez-vous ?

J’étais sportif amateur. Je travaillais en journée comme magasinier chez un concessionnaire de voitures puis j’allais m’entraîner à Namur deux à trois fois par semaine le soir. Quand l’opportunité d’aller à Charleroi s’est présentée, j’en ai parlé à mon patron qui m’a encouragé à tenter ma chance. Il m’a octroyé une pause-carrière de cinq ans.

Quelle a été la réaction de vos parents ?

Ils étaient très contents de me voir accomplir mon rêve. Ils m’ont encouragé à saisir cette chance. Ils étaient ravis, et je pense même fiers, de me voir sur un terrain de D1. Et je crois qu’ils le sont encore plus aujourd’hui de constater que j’y suis encore et que je continue à m’y épanouir.

En tant que sportif de haut niveau, à quelles contraintes vous astreignez-vous ?

J’ai toujours été quelqu’un de très sérieux. Déjà à Namur, alors que des coéquipiers sortaient le soir, moi je préférais aller me coucher tôt. J’avais déjà une certaine approche "professionnelle" du football. J’ai aussi toujours eu une hygiène de vie très saine. Je pense d’ailleurs que ces éléments ont facilité mon passage d’amateur à professionnel.

Certaines contraintes vous ont ennuyé plus que d’autres ?

Peut-être celle de ne pas pouvoir partir en vacances durant les mois d’été puisqu’en juillet on prépare la nouvelle saison qui débute à la mi-août. Ne pas pouvoir passer de week-ends en famille, puisque les rencontres ont lieu soit le samedi soir, le dimanche après-midi ou le dimanche soir, peut aussi être embêtant, voire déséquilibrant pour l’entourage. Au niveau alimentaire, je ne me prive de rien mais je ne fais aucun excès. De toutes façons, les joueurs sont régulièrement contrôlés par le staff médical du club. Après le dernier match d’une saison, il m’arrive parfois de savourer un bon paquet de frites. Pour d’autres, les contraintes alimentaires peuvent être très difficiles à respecter.

Qu’est-ce qu’implique le port du brassard de capitaine ?

C’est une grande responsabilité. J’ai été honoré qu’on me le demande il y a plusieurs années. J’en ai pris possession naturellement, sans trop me poser de questions. Quelque part, je me suis découvert une âme de leader. Cela m’a aussi appris pas mal de choses dans le domaine de la gestion d’un groupe : savoir quand il faut hausser la voix, quand se taire, la gestion des conflits, etc.

Avez-vous un agent ? Si oui, quelle est sa fonction précise ?

Un agent vous décharge de tout ce qui est extra-sportif et permet donc au sportif de se concentrer sur ce qu’il sait faire de mieux. Dans ce sens, un bon agent est intéressant. Mais c’est encore mieux s’il est fiable et fidèle. Quant un jeune est courtisé par plusieurs clubs, il est important qu’il se fasse conseiller efficacement. Un agent peut être ainsi relativement important. S’il ne fait pas la carrière d’un joueur, il y contribue très certainement. Pour ma part, j’ai la chance d’avoir Didier Frenay à mes côtés. Il y a quelques saisons, j’avais eu des sollicitations d’autres clubs. Il les a étudiées et m’a conseillé de rester au Sporting. Il a vraiment vu ce qui était le mieux pour moi. Malheureusement, certains agents pensent avant tout à eux-mêmes et à leur commission. 

Quels avantages voyez-vous à être footballeur professionnel ?

Le principal c’est celui de donner du plaisir aux gens, aux spectateurs, aux supporters de son équipe. Puis, il y a aussi la reconnaissance de vos qualités par le monde sportif et médiatique lorsque vous effectuez une belle prestation. Il y a ensuite le fait que l’on puisse passer pas mal de temps avec sa famille car, en semaine, les entraînements ne se prolongent pas au-delà de 17h. C’est d’ailleurs une différence fondamentale avec le footballeur amateur qui, bien souvent, travaille en journée puis rentre quelques minutes chez lui pour aller chercher son sac et filer aux entraînements en soirée.

Pourriez-vous nous décrire une semaine-type d’un footballeur de première division ?

Celle-ci varie forcément en fonction des clubs et des coachs. Ici au Sporting, nous avons un ou deux entraînements par jour. Ceux-ci sont entrecoupés par un repas collectif. Le jour du match, nous devons être au stade à 16h. Là, nous prenons tous ensemble une collation (pâtes, viande blanche, fruits) puis nous avons une période de repos et de relaxation. Certains jouent au billard ou au ping-pong, d’autres lisent ou regardent la télé. A 18h, soit deux heures avant le coup d’envoi, nous avons la théorie d’avant match. L’échauffement commence à 19h20. Le lendemain, un décrassage peut être programmé par le staff technique dès 9h30. On peut aussi en profiter pour soigner les petits bobos.

Que faites-vous pour vous détendre le lendemain d’une rencontre ?

Je suis quelqu’un d’assez casanier donc j’apprécie beaucoup rester à la maison avec ma famille. Je vais rendre visite aux parents, je fais une sieste. Je ne suis pas un fanatique du football mais j’aime bien regarder un match à la télé de temps en temps.

La carrière d’un sportif de haut niveau est bien souvent plutôt courte. Peut-on vivre de ses rentes après avoir raccroché ses chaussures ?

Si on joue plusieurs années dans un très grand club européen, je pense qu’en effet on peut être à l’aise financièrement pour le restant de ses jours. Des stars d’Anderlecht peuvent aussi, selon moi, voir venir. Mais les salaires en Belgique ne sont pas du tout comparables aux sommes astronomiques que touchent les meilleurs joueurs du monde. Personnellement, après tant d’années passées en D1 dans un club stable comme le Sporting de Charleroi, je peux me dire que j’ai de quoi assurer mes arrières durant quelques années mais il faudra néanmoins, une fois ma carrière terminée, que je me trouve une nouvelle occupation professionnelle. Quelqu’un qui évoluerait une ou deux années en D1 puis d’autres en D2 et en D3 n’aura pas gagné suffisamment, à mon avis. 

Comment êtes-vous payé ?

J’ai un salaire fixe ainsi que des primes par match. Des primes de qualification (coupe de Belgique, coupe d’Europe) peuvent être octroyées. Je pense d’ailleurs que l’on s’oriente de plus en plus vers des salaires fixes moindres mais des primes plus élevées. D’autres avantages peuvent être accordés par le club : voiture, logement, etc.

Pour terminer, quels conseils donneriez-vous à un.e jeune footballeur.se qui rêve de faire de sa passion son métier ?

Le plus important, c’est d’avoir la flamme, de continuer à pratiquer son sport avec le même plaisir, ne pas vouloir être footballeur uniquement pour la gloire ou l’argent. Je lui conseillerais aussi de terminer ses études secondaires d’une façon ou d’une autre car il n’est pas facile de percer dans le milieu de football. Le risque d’échec est trop important.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.