Mme Nizette,
Assistante pharmaceutico-technique

Interview réalisée en janvier 2005

Quel est votre parcours professionnel ?

J'ai fait mes études à Verviers, je me suis orientée vers l'option siences durant mes études secondaires puis j'ai choisi de faire la qualification assistante en pharmacie pendant les 2 dernières années.
J'ai d'abord travaillé dans des officines privées notamment en faisant des remplacements puis j'ai postulé à l'Hôpital de Bavière et je travaille en milieu hospitalier depuis 20 ans.

En quoi consiste le travail d'assistant en pharmacie en milieu hospitalier ?

Lorsque vous êtes en dehors de l'hôpital, vous vous rendez à la pharmacie avec votre prescription. Ce qui se passe à l'hôpital est évidemment différent. Il existe deux sortes de délivrances : l'à priori et l'à posteriori. Avant on fonctionnait avec des stocks de médicaments dans les salles et la pharmacie réapprovisionnait ces dotations et pas les patients. Si un patient avait besoin d'un analgésique, le médecin autorisait sa délivrance et faisait la prescription après, c'est ce que l'on appelle la délivrance à posteriori. Légalement, depuis une quinzaine d'années la délivrance doit se faire à priori en tout cas pour les salles en général, pas pour les soins intensifs ou les urgences où il est impossible de faire de l'à priori.
En fonction de la prescription et de la posologie, il y a un calcul de réapprovisionnement pour un patient x, nous fournissons le nombre de comprimés, d'ampoules ou autres formes de spécialités dont il a besoin pour être traité 3 ou 4 jours.

Fournissez-vous toutes les salles de l'hôpital ?

Toutes les salles, les hôpitaux de jour, les blocs opératoires, les 1036 lits répartis sur 3 sites : la Citadelle, Sainte-Rosalie et le Château Rouge, plus les polycliniques et les urgences.
Les urgences ne sont pas des lits, ce sont des entrées.

Combien de personnes travaillent à la pharmacie ?

Nous sommes 30 équivalents temps plein : 8,5 pharmaciens, 10 ou 11 assistants et puis il y a les ouvriers de pharmacie qui s'occupent de l'approvisionnement, qui transportent les palettes de médicaments avec leurs clarcks.
Il y a aussi tout le travail de conditionnement qui est très important en temps : on reçoit les médicaments par palette mais on les administre individuellement, par comprimé. On déconditionne donc les emballages pour les reconditionner en doses unitaires. Chaque comprimé a son nom, son numéro de lot et sa date de péremption.

A quelle fréquence distribuez-vous les médicaments ?

La semaine est divisée en deux, il y a deux gros jours de distribution. Dans certaines salles, la distribution doit être quotidienne.

Comment se font vos commandes ?

A l'intérieur de l'hôpital, elles se font par ordinateur via un système de gestion de stocks et de commandes pour tout l'hôpital, système qui fonctionne aussi bien pour la cuisine que pour commander des clous ou des vis au service technique.
Autre particularité dans l'hôpital : nous commandons directement aux firmes pharmaceutiques et pas chez les grossistes. Le système de facturation de l'hôpital est différent des pharmacies extérieures : il n'y a pas de marge bénéficiaire facturée au patient hospitalisé mais il y a un financement hospitalier qui dépend du nombre de lits, de la lourdeur des pathologies traitées, des différents services de l'hôpital.
La gestion des commandes est aussi menée par un assistant en pharmacie et c'est un poste important car il y a 1500 spécialités à l'hôpital qui sont commandées à très grandes fréquences et surtout qui doivent être suivies régulièrement.

On a du mal à réaliser que nous nous trouvons dans une pharmacie ?

L'endroit ressemble effectivement à une grande zone de stockage. Nous avons une superficie de 1000 m² et il n'y a pas beaucoup de décoration !
Avant tout, ce doit être fonctionnel. Les quantités sont évidemment beaucoup plus importantes. Nous stockons les médicaments par cartons plutôt que par boîtes.
Pour le réapprovisionnement à priori, l'ordinateur sort par unité de soins la liste de tous les médicaments qui doivent être réapprovisionnés en salle. L'assistant les prélève dans le stock de la pharmacie puis monte en salle avec un chariot et il redistribue les médicaments par patient, basé sur la prescription informatique du médecin. Chaque chariot contient les médicaments pour huit patients.

Il n'y a donc pas de stocks de médicaments dans les salles ?

Si, il y a quand même un stock d'urgence parce que lorsqu'un patient est hospitalisé, quand la pharmacie est fermée, cette armoire d'urgence est très importante : elle contient un grand nombre de médicaments mais en faible quantité.
Les infirmiers disposent d'un plan thérapeutique avec le nom du produit et les heures d'administration en fonction de la prescription.
Tout ce travail de distribution est conséquent dans notre emploi du temps ainsi que les commandes et la gestion des stocks.
Les 1500 médicaments sont rangés dans sept armoires, chaque assistant est responsable d'une armoire et doit s'assurer des réserves, des réapprovisionnements.

Y a-t-il un secteur production aussi ?

Bien sûr et il est très important. Ce qui caractérise aussi le travail en hôpital, ce sont les préparations stériles, par exemple, les préparations parentérales.
Nous avons un gros service de néonatologie et de pédiatrie qui nous amène à préparer des alimentations parentérales pour les patients qui ne savent pas se nourrir naturellement, ni par sonde gastrique, et qui sont alimentés par voie intraveineuse. Chaque poche stérile est préparée en pharmacie. Tous les 15 jours, nous sommes deux ou trois à travailler toute une journée à la préparation de ces poches stériles. Ces poches sont conditionnées sous flux laminaire à air pulsé stérile. Ce travail exige des techniques de préparations particulières et tout à fait spécifiques à l'hôpital. Ces hottes n'existent pas en pharmacie extérieure, elles coûtent environ 12500 €. Nous les utilisons également tous les jours après-midi pour ajouter des vitamines et de sels minéraux aux poches d'alimentation pour adultes.

La distribution des médicaments a l'air si minutieuse, comment se fait-il qu'il y ait des retours ?

Nous distribuons les médicaments généralement pour 5 jours maximum, et parfois le médecin change la posologie ou le traitement. On peut aussi donner des médicaments à un patient pour 4 jours, et si le médecin l'autorise à quitter l'hôpital le 3ème jour, les médicaments non administrés sont retournés à la pharmacie. Nous devons également gérer les retours des médicaments des salles car on ne peut facturer au patient que ce qui lui a été réellement administré.

Et c'est vous qui facturez ? Comment cela se passe-t-il ?

Oui, c'est la pharmacie qui est responsable de la facturation. Il y a donc un gros travail administratif à faire qui passe d'abord par l'identification du médicament avant qu'il ne soit à l'INAMI, puis il y a les médicaments à critères qui ne sont remboursé que pour certaines pathologies.
C'est la pharmacie qui donne l'autorisation de facturer les médicaments. Lorsqu'il y a des rejets de facturation, ils arrivent aussi chez nous. Il faut donc que nous maîtrisions toute la facturation hospitalière qui est très complexe. C'est souvent un aspect très méconnu de notre profession même par les médecins ou les infirmiers pour qui ce sujet reste parfois très nébuleux.
Nous nous occupons aussi de la gestion de prothèses et d'implants (tout ce qui est destiné à rester dans l'organisme un certain temps), les pacemakers par exemple. Il s'agit surtout ici d'une gestion administrative.
Et enfin, nous gérons les commandes de matériel stérile et des pansements pour tout l'hôpital.

Existe-t-il des actes que vous ne pouvez poser ?

Non, mais il faut que ce soit sous la responsabilité d'un pharmacien.
Une pharmacie ne peut pas être ouverte sans la présence d'un pharmacien.

Quels sont vos horaires de travail ? Sont-ils compatibles avec une vie de famille ?

Les horaires sont tout à fait compatibles avec une vie de famille : 8h30 à 16h50 et nous prestons le samedi matin à tour de rôle, c'est une garde. Les assistants ne font pas d'autres gardes.

Quels sont les qualités indispensables pour bien exercer votre métier ?

  • Être capable d'accomplir un travail en position debout, avoir une bonne vue et de la dextérité ;
  • Avoir de la précision et de l'attention dans le travail associé à une rapidité de réalisation ;
  • Avoir le sens des responsabilités ;
  • Avoir le sens de l'organisation ;
  • Avoir le sens du travail en équipe et du respect des autres ;
  • Être ordonné ;
  • Avoir l'esprit d'initiative dans le respect des procédures ;
  • Savoir faire preuve de discrétion ;
  • Avoir un contact aisé avec les autres professionnels de la santé ;
  • Respecter les horaires ;
  • Avoir le souci de se perfectionner ;
  • Avoir une certaine curiosité intellectuelle.

Est-ce que c'est un secteur porteur d'emploi ?

Oui. De façon générale, en milieu hospitalier, nous avons besoin de personnes qualifiées. D'autant plus que pour le moment, il y a d'une part une charge de travail qui augmente, et d'autre part, des exigences de qualité de plus en plus grandes.

Quels conseils donneriez-vous à une personne qui voudrait exercer ce métier ?

Comme le domaine est très vaste, je conseillerais de ne pas s'arrêter à l'aspect rébarbatif de rigueur du métier.
En fait, si on a une curiosité intellectuelle, on s'amuse beaucoup et on va découvrir d'énormes possibilités.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.