Amalia Fremineur,
Hippothérapeute à la ferme équestre Louvain-La-Neuve

Interview réalisée en janvier 2021

Qu'est-ce qui vous a poussée à devenir hippothérapeute ?

J’ai découvert le métier d’hippothérapeute vers l’âge de 14 ans. Dans le manège où je pratiquais l’équitation, il y avait une jeune fille atteinte d’un handicap mental qui venait monter à cheval juste après moi et j’étais régulièrement amenée à donner un petit coup de main à la monitrice pour ses séances.

Petit à petit, je me suis renseignée et formée. J’ai découvert qu’au-delà de l’aspect « magique » du cheval que l’on peut supposer au premier abord, les séances d’hippothérapie sont en réalité réfléchies pour que, grâce au cadre thérapeutique mis en place, une relation triangulaire thérapeute-bénéficiaire-cheval puisse se créer et laisser émerger toutes sortes d’expériences et d’émotions, liées à la sensibilité et aux propositions de chaque membre du trio.

Quelle formation avez-vous suivie ?

J’ai suivi le bachelier en Psychomotricité à la Haute Ecole Léonard de Vinci (Bruxelles), puis le Certificat Universitaire en hippothérapie de l’UCLouvain.

Comment se déroule votre journée ?

Chaque jour, nous avons un horaire fixe de séances d’hippothérapie. La plupart des séances étant fixées de manière hebdomadaire. En journée, nous accueillons essentiellement des institutions (centres de jour, écoles spécialisées, centres thérapeutiques, etc.) en séances individuelles ou collectives. En plus de cela, nous accueillons également des personnes qui viennent individuellement. En dehors des séances d’hippothérapie, nous devons également nous assurer que tous les chevaux sont en bonne santé et prodiguer les soins si nécessaires, ainsi que diriger le travail administratif (gestion des inscriptions, de l’horaire, des stagiaires, des paiements, etc.).

Quel type de public rencontrez-vous ?

Nous accueillons tous types de personnes en difficulté, quel que soit leur âge : handicap mental ou moteur, trouble de l’attention, retard de développement, troubles sensoriels, dépression ou burn-out, autisme, troubles psychiatriques, troubles de l’attachement ou encore des personnes qui traversent un moment difficile dans leur vie. Cette liste est bien-sûr non-exhaustive.

Comment se déroule une séance d'hippothérapie ?

Il n'y a pas un déroulement type. Il faut au minimum la présence de la personne, d'un thérapeute et d'un cheval ainsi qu’un cadre garant du sens thérapeutique de cette rencontre (un timing, des règles de sécurité, un objectif). Le contenu de ce cadre (l'activité) se compose au fur et à mesure de la séance, par le trio, dans une approche collaborative et exploratoire.

L'hippothérapeute soutient cette démarche par son écoute verbale et non-verbale et par des propositions favorisant l'exploration. Il n'y a pas de consignes ni d'exercices imposés.

Il favorise le contexte dans lequel la personne peut être à l'écoute de ses propres réactions, sensations et émotions.

Outre une passion pour les chevaux, quelles sont les qualités et aptitudes nécessaires pour faire ce métier ?

Toutes les qualités nécessaires à la relation d'aide : bienveillance, authenticité, empathie, capacités d'écoute et d'observation précise et à tous les niveaux (verbal et non verbal), capacité d'accompagner les personnes dans les différentes étapes du processus (prise de conscience, acceptation, responsabilité, expression, transformations), créativité (capacité de proposer des situations innovantes, invitant au changement), esprit d'analyse (décomposer un tout en plusieurs éléments et les mettre en relation). Confiance dans le potentiel de développement de l'être humain,  patience (respect du rythme propre de la personne), humilité, clarté personnelle, abstraction (capacité de prendre du recul par rapport à la situation dans laquelle on est impliqué), vivre soi-même un cheminement personnel de type " thérapeutique ", développer une conscience corporelle, avoir une pratique corporelle,  connaissances en éthologie équine (science du comportement de l'animal), expérience de la relation avec le cheval.

Quelles sont les difficultés que vous éprouvez dans votre travail ?

Ce métier nous amène à être proche de nous-mêmes et à développer, en même temps que nos patients, des clés qui nous servent pour notre propre épanouissement. Comme tous les métiers d'aide, une attention particulière doit être portée sur le bien-être du professionnel afin qu'il puisse effectuer son métier de la manière la plus efficace. Ce métier est fortement mobilisant et coûteux en ressources diverses (attentionnelles, physiques, psychiques, matérielles, etc.), ce qui demande d’accéder à un certain équilibre de vie et de mettre en place des suivis potentiellement onéreux (supervision, thérapie personnelle, formation, etc.), en regard de salaires relativement modestes.

Les horaires peuvent être décalés (samedi, soirée). C’est un travail qui se fait aussi en extérieur toute l'année, il faut donc avoir une bonne condition physique.

Qu'en est-il de la reconnaissance de votre profession, notamment par l'INAMI ?

Il n'existe pas de reconnaissance au sens légal, il n'y a pas d'accès réglementé à la profession. Néanmoins, il existe une reconnaissance des bénéfices de l'hippothérapie avec une demande croissante de la part des institutions, parents, recommandations de la part de psychologues, médecins, psychiatres, avec un relais dans les médias qui assure à l'hippothérapie un certain succès. Il n’y a pas de remboursement prévu par les mutuelles, bien que certaines offrent un remboursement symbolique annuel. Par ailleurs, l’AMAT (Fédération des professionnels de la relation d’aide par la médiation animale) travaille à la reconnaissance des compétences professionnelles de ce secteur.

Que dire aux jeunes intéressés par ce métier ?

Il existe différentes approches en hippothérapie, il ne faut donc pas hésiter à aller voir différents endroits pour trouver ce qui vous correspond le mieux !

Il est utile d’avoir suivi une formation axée sur les bases de la thérapie et de la relation d’aide pour ensuite se spécialiser en hippothérapie. 

Du point de vue de la connaissance des chevaux, il est important de garder à l’esprit que le travail n’est jamais fini.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.