Dr Isabelle Van Wuytswinkel,
Gynécologue-obstétricienne, cheffe de service en gynécologie
Interview réalisée en janvier 2015 |
Pourquoi avoir choisi ce métier de gynécologue ?
Je ne sais pas. J’ai toujours eu quelques difficultés à répondre à cette question. Ça s’est défini il y a très longtemps alors même que je ne savais pas ce que c’était. Personne dans ma famille n’est médecin. Je suis issue d’une famille d’ingénieurs et de commerçants en alimentaire. Je n’avais donc aucune idée de ce qu’était la médecine. Au départ, je voulais être prof de math car j’aimais les math en secondaires et ma mère trouvait que l’enseignement c’était très bien pour une femme. Ma maman était femme au foyer et a toujours vécu pour sa famille.
En rhéto, pour un motif inconnu, suite à des tests au centre PMS, j’ai choisi le métier de gynécologue. Ce n’est pas dû au hasard, c’était ce que je devais faire. Et je vis une réelle passion !
Quelles sont les qualités principales pour exercer ce métier ?
Une grande disponibilité, une écoute importante, une compréhension proche de la psychologie. En tant que femme gynéco, on fait souvent référence à ce que vous vivez vous-même. Parce que vous êtes une femme, avec des problèmes de femme. Mais je pense que c’est difficile de faire abstraction de cela, pourtant, on doit rester objective face aux plaintes des patients. Un gynéco “homme“ sera peut-être plus compréhensif. Etre une femme gynéco, dans certaines circonstances, pourrait être négatif.
Quels sont les aspects positifs de votre métier ?
Faire partie de la vie des gens ! Lors d’un accouchement, vous recevez une grande satisfaction de la part du patient, il est éternellement reconnaissant. J’ai 46 ans et je suis toujours émue, émerveillée lors d’un accouchement.
Quels sont les aspects négatifs de votre profession ?
Se lever la nuit ! Les contraintes d’horaire.
Quels sont vos horaires ?
J’ai heureusement réussi avec le temps à me mettre des limites. J’ai créé une équipe qui fonctionne de la même manière. On est très peu à fonctionner comme ça en Wallonie. On a créé un système de garde : un gynéco de garde durant 24h fait les accouchements pour tout le monde. Ce qui fait que chaque gynéco ne fait pas l’accouchement de toutes ses patientes mais cela permet d’organiser sa vie de famille en dehors des gardes. La profession se féminise de plus en plus. Mais il manque souvent de gynécos dans les services !
Mes journées commencent à 9h car je souhaite m’occuper de mon enfant le matin. Le lundi, j’opère et je ne sais pas toujours à quelle heure je termine. Le mardi et le mercredi ce sont les consultations jusqu’à 21h environ. Il faut compter minimum 12h de travail par jour et une garde de 24h par semaine.
Je travaille à l’hôpital en tant que cheffe de service mais j’ai aussi une pratique privée.
Quel a été votre parcours pour devenir cheffe de service ?
C’est un peu par hasard que je suis devenue cheffe de service. Notre chef de service à l’époque est tombé malade et j’ai été commise d’office car j’étais la seule à avoir cinq ans de travail dans l’institution. Mais je voulais aussi changer les choses. Et c’est très plaisant ! Ça vous donne un titre, la possibilité de faire bouger les choses. C’est une forme de pouvoir.
Quels sont les actes techniques que vous pratiquez ?
En obstétrique, je pratique les césariennes, les accouchements, les interventions au niveau des organes génitaux, les cancers du sein, les curetages. Tout m’intéresse dans mon métier ! La chirurgie, car j’aime opérer mais aussi les accouchements. Il m’arrive parfois de faire du SAMU. J’adore l’urgence et la difficulté.
Faites vous des formations continues ?
Oui, c’est obligatoire. Je m’informe sur les nouveaux traitements médicamenteux, les nouvelles techniques, les nouveaux matériaux surtout en chirurgie. En obstétrique, c’est surtout au niveau des pathologies de la femme enceinte (diabète, hypertension, etc.).
Avez-vous vu une évolution dans votre pratique professionnelle ?
Evidemment je m’adapte, je me remets en question. Ce qui a le plus évolué, c’est la chirurgie. Surtout la cœlioscopie, qui est une grande avancée car on ne doit plus ouvrir des abdomens ! L’apprentissage de nouvelles techniques se fait en assistant à des interventions et en pratiquant sur place, plus des congrès le samedi.
Collaborez-vous avec d’autres spécialistes ?
Oui, des oncologues, des radiologues, des psychologues, des anatomopathologistes. On a des réunions d’équipe pluridisciplinaire une fois par semaine ainsi que des échanges d’avis.
Quels conseils donneriez-vous à une personne intéressée par ce métier ?
Ne vous prenez pas la tête ! Il faut connaître ses limites et savoir en mettre. Demander l’avis des confrères et avoir l’humilité de dire qu’on ne sait pas toujours tout afin de se remettre continuellement en question. C’est une qualité importante !