Dr Pierrette Seeldrayers,
Neurologue, cheffe d’un service de neurologie

Interview réalisée en janvier 2015

Comment avez-vous fait votre choix d’études ?

J’ai toujours eu envie de devenir médecin. Déjà à 5 ans, lorsque j’ai reçu une trousse de soins. Il est vrai que j’ai eu un grand-père médecin généraliste.

Est-ce que cela a influencé votre choix d’option ?

Oui, clairement. J’ai fait latin/math car mon grand-père m’a dit que c’était le bon choix. A l’époque, c’était un choix classique et valorisé pour un futur parcours universitaire. D’autant plus que j’aimais les maths. Ce n’est sans doute plus le cas aujourd’hui de choisir le latin. J’aimais beaucoup l’archéologie et j’ai hésité mais je cherchais une formation qualifiante qui corresponde à un métier ! Je souhaitais être indépendante financièrement. Je suis entrée en médecine avec l’idée de faire la psychiatrie parce que le cerveau et les pathologies comme les démences m’intéressaient. C’est durant ma formation en médecine que j’ai été plus précise dans mon choix pour la neurologie. Après mes différents stages, j’ai opté pour la neurologie en premier choix et l’endocrinologie comme second choix.

Quelles sont les pathologies les plus courantes que vous traitez ?

Nous rencontrons les pathologies suivantes : Parkinson, les mouvements involontaires (jambes sans repos, les tremblements, etc.), les épilepsies, les AVC.

Quelle est votre charge de travail hebdomadaire ?

La médecine, de façon assez paradoxale, permet une grande flexibilité aussi bien en termes d’horaire qu’en termes de qualité. C’est-à-dire que vous pouvez faire de la recherche ou de la clinique (en privé ou en hospitalier), ce qui permet de changer en fonction de votre vie privée. J’ai choisi de travailler principalement à l’hôpital et j’assure une consultation privée le samedi avec quelques rendez-vous afin de répondre à la demande de patients qui ont des horaires moins flexibles que ceux de l’hôpital. Pratiquement, je commence ma journée vers 8h et la termine vers 18h30. A cela, il faut rajouter 24h de garde (en semaine) par mois et un jour de week-end. De plus, il y a les réunions pluridisciplinaires, les congrès qui sont très riches en rencontres de confrères. Je fais deux congrès par an : en neurologie générale et dans ma sous-spécialité qui est la sclérose en plaques. De plus en plus les médecins se spécialisent et se sous-spécialisent suite à la complexité de la pratique hospitalière. Cela permet de se démarquer de la médecine libérale. Je travaille avec 13 neurologues et la plupart ont une sous-spécialisation.

Pratiquez-vous des actes techniques en neurologie ?

C’est une spécialité plutôt "intellectuelle" en ce sens que nous faisons très peu d’actes techniques et pas de chirurgie contrairement aux ORL ou aux ophtalmologues qui opèrent tous. La neurochirurgie est totalement séparée de la neurologie. L'intérêt principal de la neurologie est clairement le diagnostic clinique et ensuite le traitement. C’est un domaine qui fait beaucoup de progrès, les neurosciences en particulier. Dans le temps, il arrivait de voir un patient une seule fois et de ne pas faire de suivi par manque de traitement mais ce n’est plus le cas dans la plupart des maladies. Certains de mes collègues pratiquent aussi de l’électrophysiologie, mais avant cela, ils ont fait l’anamnèse, l’hypothèse, le diagnostic (confirmé par tel ou tel examen). Il y a aussi les électroencéphalogrammes souvent réalisés par les épileptologues (spécialistes de l’épilepsie), ce qui nous amène à voir des enfants, à la demande du neuropédiatre, ou des adultes mais pas de bébés.

Votre spécialité est-elle en pénurie ?

J’ai la chance de travailler dans un gros service qui ne souffre pas de pénurie mais actuellement on en demande pas mal suite au fait qu’il y a quelques années un seul neurologue sortait par an.

Vous êtes spécialisée dans la sclérose en plaques. Pourquoi ce choix ?

C’est au fil des rencontres, un patient qui vous interpelle. Dans mon cas, c’est une jeune fille de 16 ans qui a fait une sclérose en plaques absolument fracassante. Elle était devenue quadriplégique et ne bougeait plus qu’un œil, tout en étant consciente. A cette période, je faisais de la recherche sur une protéine de la myéline propre à la sclérose en plaques, c’est comme ça que j’ai suivi son cas. De fil en aiguille, j’en ai suivi de plus en plus. Dans mon parcours d’étudiante en médecine, je suis allée terminer ma spécialisation de trois ans en neurologie aux Etats-Unis. Ce qui m’a ouvert les portes là-bas pour suivre une sous-spécialisation également. Après les Etats-Unis, j’ai été rapidement engagée en Allemagne pour quelques années. De nouveau, j’ai pu apprendre les langues et voyager.

Qu’est-ce qui vous a amenée à devenir cheffe de service ?

J’ai été un peu commise d’office il y a 10 ans par le précédent chef de service. C’est très intéressant de pouvoir échanger, organiser avec mes collègues. Utiliser les points forts de chacun.

Que diriez-vous à quelqu'un souhaitant embrasser une carrière de neurologue ?

Il faut vraiment avoir envie ! Etre motivé et prêt à un investissement important intellectuellement et émotionnellement. On est fortement dans le soutien psychologique à la personne. La passion doit être là. 

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.