Interview anonyme,
Infirmière en hôpital de jour gériatrique
Interview réalisée en janvier 2007 |
Comment la gériatrie est-elle perçue dans le monde médical ?
Cela dépend des institutions et des personnes. J’ai rencontré certains médecins ou spécialistes pour qui la gériatrie était la cinquième roue de la charrette, toujours considérée avec une connotation négative. Tandis que lorsque vous travaillez dans une unité gériatrique, ce regard n’existe pas.
Comment caractériser votre approche, votre travail avec les personnes âgées ?
La grande caractéristique de la gériatrie est la polypathologie : il n’existe jamais qu’une pathologie en gériatrie. Si un patient est diabétique, il peut aussi souffrir, par exemple, d’insuffisance rénale. On ne soigne pas, comme dans certains services, une seule pathologie mais l’ensemble des organes du patient, le patient dans sa globalité. C’est l’aspect le plus intéressant de la gériatrie.
N’est-il pas trop éprouvant de travailler avec des personnes en fin de vie ?
Moi qui ai travaillé pendant cinq ans en soins palliatifs, je ne trouve pas cela du tout éprouvant. S’il arrive qu’un patient soit en fin de vie dans notre unité, c’est beaucoup plus frustrant parce que l’on ne peut pas tout faire pour lui tandis qu’une unité en soins palliatifs est vraiment conçue, de par l’effectif plus important d’infirmiers, pour l’accompagner le mieux possible dans cette dernière phase de vie. Ici, avec trente-deux patients, il est difficile, par exemple, de tenir la main d’un patient en fin de vie et de prendre du temps parce que les trente et un autres ont besoin de soins.
Pour répondre à votre question, la difficulté, ici, est justement de passer d’un patient à l’autre avec une attitude complètement différente selon les pathologies. Si une patiente souffre d’une fracture du fémur, on doit beaucoup la stimuler tandis que la chambre voisine peut être occupée par un patient en fin de vie : chaque cas en gériatrie nécessite un comportement infirmier différent. D’autre part, notre rôle premier est de soigner, or, nous sommes amenés à voir des patients mourir, ce qui peut être difficile par rapport à notre rôle. Maintenant, la notion de mort est intégrée à celle de la vie et ce sont souvent les circonstances de celle-ci qui nous ébranlent. Si nous avons bien pu faire notre travail et que le patient décède sans douleur, en paix, alors nous sommes satisfaites d’un travail bien accompli.
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui souhaiterait exercer votre métier ?
Une personne qui travaille en gériatrie est une personne censée savoir travailler partout. C’est tellement pluridisciplinaire que l’on doit tout observer constamment et cela forme le métier, cela permet une bonne vision globale du patient. Ce qui manque cruellement dans d'autres hôpitaux où, si vous consultez un service ORL, on ne va pas aller plus loin que vos oreilles et votre nez !