Comment êtes-vous devenue herboriste ?

J'ai une formation d'assistante en pharmacie. Avant de reprendre une herboristerie existante, j'ai travaillé pendant plus de 20 ans dans une pharmacie. A cette époque, j'ai suivi des cours d'homéopathie dispensés en trois ans, utiles à l'époque pour répondre à certaines demandes de la clientèle. De là, j'avais déjà un bon bagage. L'homéopathie, ce n'est pas l'herboristerie, mais on reste quand même dans le domaine des plantes. A partir de ce moment-là, je n'ai plus arrêté les formations. Je suis allée suivre des cours un peu partout, et même à l'étranger.

Pensez-vous que les cours d'homéopathie vous ont bien préparée au métier ?

Ma formation en tant qu'assistante en pharmacie m'a déjà beaucoup aidée, parce qu'il y avait des cours de botanique, et qu'à mes débuts, dans les années 60, il y avait encore de vieux médecins qui prescrivaient des remèdes à base de plantes. Toutes les préparations magistrales en pharmacie étaient réalisées à 50% avec des extraits de plantes. Ce n'était donc pas nouveau pour moi : dans mon herboristerie, je me suis retrouvée dans la même situation que dans une pharmacie, mais avec d'autres produits, plus naturels.

Les clients réagissent-ils différemment dans une herboristerie ?

Ils ont une autre optique, une autre façon de voir la santé. Souvent, les gens qui s'adressent à nous ont déjà fait un pas vers l'homéopathie. Ils prennent leur santé en main, se rendent compte que la chimie a ses limites, et que, dans certains cas, on peut se soigner par des plantes. Bien sûr, on a toujours besoin de la chimie, il ne faut rien rejeter, mais on privilégie le préventif au curatif. Il y a des personnes qui font leurs propres mélanges, ils bouquinent beaucoup et connaissent les plantes, ou leurs grands-mères leur ont fourni des recettes de famille. Mais c'est quand même un métier, et il vaut mieux demander conseil, et rester prudent.

Cultivez-vous vous-mêmes vos plantes ?

Non. En herboristerie, on achète des plantes séchées chez des grossistes. Moi, je les achète au kilo, par 2 ou 3, parfois 5 kilos, ça dépend de la rotation ou du besoin, et je les vends au détail. J'ai les plantes en vrac, et je divise tout à la demande. Les gens viennent acheter 100 g de ceci, 100 g de cela. Ou alors, s'ils ont besoin de quelque chose de bien spécifique, je les conseille. On n'est pas thérapeute : le but de notre métier, c'est de conseiller et guider les clients.

Dans l'ensemble, la profession comprend-elle plus de préparateurs ou de commerçants ?

On ne prépare pas beaucoup en herboristerie, on vend surtout des plantes en vrac, parce que tout le reste se fait en laboratoire. On peut préparer son produit, mais il faut le faire analyser, le présenter, payer pour pouvoir le mettre en vente... Tout un lot de contraintes qu'on évite le plus souvent.

Mais de "vraies" herboristeries, il n'y en a pas beaucoup. Ce sont plutôt des magasins diététiques qui vendent des aliments, comme du pain, du tofu, et avec un coin herboristerie où les plantes sont mises en sachets déjà préemballées. Il faut dire que vivre seulement par l'herboristerie, ce n'est pas possible. Il faut proposer un choix plus vaste pour que ce soit viable. Il n'y a pas assez de demandes. Moi, je vends également des produits diététiques, pas de produits alimentaires, mais des compléments préparés en laboratoire, comme des vitamines, des sels minéraux ou des gélules de plantes. Il y a quand même des prérequis demandés, il faut savoir ce que l'on vend, connaître les formules et les dosages, etc. C'est une pharmacie de plantes, en somme.

Comment se déroule votre activité ?

On travaille en fonction des saisons. En juin, lors des examens, les étudiants fatigués et stressés se dirigent vers des plantes qui vont les désangoisser ou leur donner du tonus. Pour mieux se concentrer, ils chercheront des vitamines ou de quoi faciliter leur mémoire. Pendant les vacances, on va vendre des produits naturels pour bronzer, ou contre les piqûres d'insectes. Après, il y a l'hiver, les rhumes, etc.

Y-a-t-il plus de clients maintenant qu'avant ?

Cela a certainement évolué. Il y a eu un petit moment de crise, comme pour tout le monde. Mais maintenant, beaucoup de gens se dirigent vers les plantes, il y a un regain d'intérêt pour tout ce qui est naturel.

Est-ce un secteur d'avenir ?

Oui, pour autant que ce soit bien encadré au niveau des lois. En Belgique, on a déjà fait une première, on nous a autorisé à vendre plus de 300 plantes, contre 64 en France. Ce résultat a été obtenu grâce aux associations. Mais il y a encore beaucoup de lois en projet, on veut progresser.

Quelles qualités demande le métier d'herboriste ?

Etre à l'écoute des clients. Bien connaître les plantes, car certaines ne sont pas sans danger. C'est justement un des problèmes du métier : pour le moment, n'importe qui peut ouvrir un magasin, sans avoir nécessairement suivi de formation. On essaie de tendre vers plus de professionnalisme, pour obtenir une reconnaissance du métier. Ainsi, des formations se remettent en place. C'est vrai que celui qui n'aura pas de connaissances de base en biochimie sera un peu perdu, mais pour le reste, ça peut aller. Ce qui rebute le plus les étudiants, souvent des gens qui ont suivi une autre formation (kinésithérapeute, infirmière, agronome ou autres), et qui travaillent déjà, ce sont les cours de comptabilité et de gestion. Parce qu'une herboristerie, c'est aussi un commerce.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu'un qui voudrait se lancer dans la profession ?

De faire beaucoup de stages avant de se lancer tout seul, car on ne devient pas bon tout de suite, ni même après deux ans d'études. Même s'il n'y a pas beaucoup d'herboristeries, il y a encore moyen de se débrouiller, et c'est vraiment important de se former sur le terrain.

Quels sont les inconvénients du métier ?

Comme je suis passionnée, je ne vois pas d'inconvénients majeurs, si ce n'est qu'on est tenu à sa boutique, sans bouger, de 8h à 18h. On n'a pas beaucoup de temps libre. Quand on est herboriste, on est son propre maître, mais un indépendant est soumis à de nombreuses contraintes. Sinon, je trouve ce métier passionnant : on est toujours en contact avec la vie, la santé, le bien-être, la recherche de mieux être.

Y-a-t-il encore beaucoup de produits à découvrir ?

La recherche progresse chaque année. Je prends l'exemple du millepertuis : il y a quelques années d'ici, on ignorait qu'il pouvait avoir des effets secondaires. Maintenant, on sait qu'il faut prendre certaines précautions. La recherche nous aide à nous prémunir et à mieux conseiller le client. Mais il faut évidemment se tenir au courant.

Comment envisagez-vous l'évolution du secteur ?

Je suis optimiste, surtout au niveau européen. Chaque pays se bat individuellement pour avoir des possibilités de vente et d'installation plus larges, et tous en retireront les bénéfices. On essaye d'avoir des contacts avec les associations professionnelles des autres pays. Une loi européenne va se créer, et, via internet, on peut obtenir des renseignements sur ce qui se fait dans les autres pays, comme au Canada, où les recherches sont plus poussées. La mise en commun de toutes nos connaissances constitue un pas en avant pour les herboristes.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.