Mr Joppe Wouters,
Acrobate et concepteur d'agrès

Interview réalisée en avril 2012

Quel est votre parcours ?

Dans l’école où j’ai suivi mes études secondaires, il y avait une option arts circassiens (j’avais choisi jonglerie, équilibre sur échelle et monocycle). J’avais 14 ans et cela m’a tout de suite intéressé. J’ai continué à suivre des cours jusqu’à dix ou douze heures par semaine pendant mon temps libre. Je suivais aussi des stages à l’école de cirque à Bruxelles. A 16 ans, mon père, qui est metteur en scène, a créé un spectacle regroupant d’autres jeunes artistes circassiens et avec lequel nous avons tourné dans les centres culturels, notamment. C’était mon premier contact avec le réseau professionnel. Après cela, je me suis dirigé vers les études en arts du cirque, proposées par l'ESAC qui est une École Supérieure des Arts. J’y ai découvert l’acrobatie et j’ai choisi la bascule comme spécialisation. J’avais aussi des cours de théâtre et de danse. A ma sortie de l’ESAC, j’ai commencé à tourner dans des festivals avec un trio puis un duo, toujours en bascule, avant de monter un spectacle solo avec lequel je tourne toujours dans les festivals et les théâtres. 

Avec Chloé Vancompernolle, votre compagne, vous avez aussi fondé "Circus Marcel". Parlez-nous de cette aventure

Nous avions envie de monter un nouveau cirque en Belgique. Nous avons commencé par acheter un chapiteau. Mais tout restait à faire. Nous avons créé un premier spectacle très acrobatique qui s’appelait « G4 ». Ensuite, nous avons travaillé sur un projet de théâtre jeune public à Anvers. Il s’agissait d’une combinaison entre le théâtre, avec deux comédiennes, et notre cirque, adressé à des jeunes enfants. On montait notre chapiteau à côté des centres culturels qui nous avaient programmés. Depuis la fin de ce projet, nous faisons une pause afin de réfléchir à l’avenir du cirque, à la prochaine création.

Touchez-vous également à d'autres facettes du cirque ?

Oui, je conçois et réalise des agrès de cirque (structures métalliques pour les trapézistes, les funambules, les bascules). C’est une occupation qui me prend beaucoup de temps. A 15 ans, j’ai découvert un poste à souder dans le garage de mon grand-père et j’ai tout de suite aimé créer ce genre de choses. A la demande d’autres compagnies, belges ou étrangères, d’écoles de cirque, je crée donc des mâts chinois, des portiques de trapèzes, etc.

Quels sont les autres artistes qui font partie de votre équipe ?

Cela dépend des créations. A la base, nous sommes une équipe de quatre : moi pour l’acrobatie, Chloé pour le trapèze, mon frère Tobe qui est musicien et Olivier Zimmermann qui est funambule. Selon les besoins, nous travaillons aussi avec d’autres artistes.

Qu'est-ce qui vous plait dans le cirque ?

Le cirque fait partie de ma vie. Je ne fais que ça, tout tourne autour de ce monde là. J’aime le rapport très physique à la prouesse, le mélange théâtral qui peut captiver le public. C’est un tout.

Est-ce un métier difficile ?

Pour moi, ce n’est pas plus difficile qu’un autre métier, c’est juste différent. Il s’agit d’un métier très physique, qui demande beaucoup d’entraînement et qui suppose des horaires particuliers : nous travaillons généralement les week-ends, pendant les vacances scolaires, etc. Il faut beaucoup de discipline, de motivation, surtout lorsque l’on monte sa propre compagnie. Quand on sort de l’école, il existe deux possibilités : soit on est pris en charge par une compagnie et alors, on se laisse guider par le metteur en scène et le scénographe ; soit on fait le choix de lancer son propre projet et donc, on est son propre employeur. Dans ce dernier cas, cela demande une motivation supplémentaire car il faut tout gérer.

Est-ce facile de monter son propre cirque ?

Non, pas du tout ! C’est extrêmement difficile mais aussi extrêmement intéressant. A la sortie de l’ESAC, on savait comment créer un spectacle, on a suivi des cours pour cela. Par contre, on ne connaissait rien en ce qui concerne les lois, les assurances, les homologations, les subventions, les contraintes techniques liées à un chapiteau ! Une fois le chapiteau acheté, on a donc dû tout apprendre nous-mêmes, sur le tas, et c’était loin d’être évident. Au départ, on était submergés par la paperasse administrative, ce qui laissait peu de place à la création en tant que telle. Maintenant, on prend du recul pour que cela soit moins lourd pour nous d’un point de vue administratif et pour qu’on puisse continuer à proposer une création de qualité. Ceci dit, à chaque fois qu’on monte le chapiteau et qu’on voit les gradins remplis et le public content, on ressent une très grande satisfaction.

Quelles sont, selon vous, les qualités à posséder pour devenir acrobate ?

Il faut savoir se prendre en main, avoir la volonté de travailler physiquement tous les jours, être curieux. Pour moi, il ne faut pas forcément avoir un don, il faut surtout être très motivé. Il faut passer au-dessus des blessures et des moments un peu moins faciles. Je trouve qu’il s’agit d’un milieu fascinant, où chacun peut trouver une discipline qui lui convient en fonction de son physique et de son envie.

Est-ce que c'est important d'être polyvalent dans ce domaine ?

Dans le cas de « Circus Marcel » oui, car nous gérons aussi tout l’aspect administratif, technique des créations mais d’un point de vue purement artistique, je ne pense pas que cela soit indispensable. Je pense au contraire que c’est bien d’être spécialisé dans une technique et de tourner avec ce bagage- là.

Quels sont les conseils que vous donneriez à une personne qui veut se lancer ?

Tout dépend de ce qu’il envisage comme carrière (suivre une compagnie ou se lancer seul) mais dans les deux cas, je lui dirais de prendre de l’expérience en travaillant dans différentes compagnies et de bien s’informer sur le côté non-artistique d’un spectacle s’il veut monter la sienne.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.