Mr Marcel Bourcy,
Technicien spécialisé en énergie thermique solaire
Interview réalisée en janvier 2008 |
Quel est votre parcours de formation ?
Succinctement, j'ai fait mes humanités modernes, type scientifique et une spéciale mathématiques. Ensuite j'ai entamé des études d'ingénieur. J'ai arrêté après deux ans car je voulais aller travailler. J'ai repris des études en 2001 pour devenir installateur. J'ai fait un patronat en installation sanitaire, un patronat en chauffage central et je me suis spécialisé dans plusieurs domaines en suivant des formations, notamment sur l'énergie solaire thermique. J'ai suivi une première formation en France et, par la suite, j'ai également suivi le premier cours en énergie solaire donné à Liège.
Quel est votre parcours professionnel ?
J'ai un parcours très diversifié et assez complet où s'entremêlent formation et pratique professionnelle. Après avoir travaillé dans différents secteurs, j'ai travaillé dans le domaine du chauffage sanitaire, d'abord comme magasinier pendant 9 mois, puis en service au comptoir pendant 6 mois. Cela m'a apporté une certaine expérience, une très bonne connaissance des pièces et m'a ouvert la porte vers de nouveaux horizons. Alors que je donnais un coup de main à un ami pour rafraîchir des kots, l'idée m'est venue de devenir installateur. J'ai fait mes patronats et pendant plusieurs années, j'ai été installateur en sanitaire et en chauffage central.
Après deux ans de pratique, j'ai eu l'opportunité de devenir formateur dans un centre de formation IFAPME. J'ai donné des cours dans le domaine du chauffage et du gaz. Ensuite, j'ai voulu me diriger dans le domaine de l'énergie solaire thermique. C'était vraiment le début, j'ai innové deux marques en Wallonie en faisant leurs premières installations. Dans le cadre d'un plan d'action mis en place par la Région Wallonne pour promouvoir l'énergie solaire thermique, j'ai été installateur, formateur et fournisseur Soltherm, une marque de chauffe-eau solaire. J'ai aussi créé un cours de perfectionnement hydraulique et de régulation solaire.
De 2002 à 2004, j'ai cumulé ma fonction d'installateur avec celle de Sanutal Solar pour démarrer financièrement. Depuis 2004, je ne travaille plus que pour Sanutal. J'ai été formateur pendant plusieurs années mais je ne donne plus de formations actuellement même si, arrivé à un certain niveau d'expérience, vous êtes très sollicité. Je viens par exemple d'accepter un poste de consultant pour un nouveau cours en énergie thermique solaire sur les grandes installations (production d'eau chaude pour les buildings, entrepôts, etc.), qui va être créé par CEFORTEC (Centre de Formation aux Techniques Spéciales du Bâtiment).
En quoi consiste votre travail ?
J'ai ma propre société mais je travaille pour Sanutal Solar, fournisseur officiel de la Région Wallonne en produits d'énergie solaire. Je suis responsable technique et commercial pour la zone Bruxelles-Capitale - Wallonie - Grand duché de Luxembourg. Je m'occupe de la prospection, des visites en clientèle, du suivi et du service après-vente. J'assure la formation des grossistes et des vendeurs mais aussi celle des installateurs et je leur apporte une aide, un soutien. C'est un plus que nous leur offrons. C'est très vaste. On peut par exemple aider soit avant l'installation (schéma hydraulique ou de régulation à réaliser), soit après la mise en fonctionnement (contrôle d'une installation terminée). Il arrive aussi que j'aide l'un de nos clients grossiste qui organise le salon Batisud à Libramont et je fais également quelques salons à l'étranger.
Il faut savoir que nous organisons notre propre salon en Belgique : le salon Bois et Habitat de Namur qui est le plus grand salon sur l'énergie renouvelable en Wallonie. Nous avons aussi lancé le premier salon Habitat à Liège et, l'année suivante, c'est l'un de nos clients qui l'a repris. Les salons sont créés par nos clients pour développer leur chiffre d'affaires et nous les aidons dans ce sens. Une autre partie de mon travail consiste à visiter des bureaux d'études et des bureaux d'architectes.
Le statut d'indépendant m'offre une très grande liberté et me permet d'avoir plusieurs activités. En plus de ma fonction de technico-commercial chez Sanutal Solar, je suis responsable technique chez TiSUN France, fabricant de systèmes solaires thermiques, et conseiller en thermie solaire pour un fabricant de boiler en France.
Qu'est-ce qu'on entend par énergie thermique solaire ?
L'énergie solaire est une énergie propre, gratuite et renouvelable. Il en existe deux sortes : le solaire photovoltaïque (éolienne, biomasse ou biothermie, c'est-à-dire tout ce qui est à base de bois) et le solaire thermique. L'énergie thermique solaire est utilisée pour chauffer de l'eau à destination sanitaire ou pour le chauffage. J'ai choisi de me spécialiser dans le chauffage solaire.
Il n'y a pas de différence fondamentale entre les formations "chauffage avec énergie fossile" et "chauffage solaire". Ce sont les mêmes bases avec les quatre points les plus importants du cours, à savoir un producteur, un émetteur, des tuyauteries hydrauliques et la régulation. L'émetteur c'est par exemple le radiateur et le producteur d'énergie, c'est votre chaudière. Entre les deux, il y a des tuyauteries et un circulateur pour tout faire tourner, cela s'appelle l'hydraulique. Ensuite, il faut réguler tout ce système. La régulation reçoit et suit des ordres.
En solaire, C'est le même principe avec 3 éléments importants en plus : haute température, antigel et pression plus élevée. Quand le soleil est là, il peut donner toute son énergie, toute sa puissance. On peut stocker jusqu'à 60 degrés au mois de juillet, 35 degrés au mois de décembre et il peut-être très chaud aussi bien en été qu'en hiver. On ne sait pas maîtriser cette énergie et donc quand on l'a, il faut essayer de la stocker le plus vite possible et le plus longtemps possible. Vous avez votre chaudière qui est en fait votre capteur. Il faut faire attention au froid en hiver (antigel) et au chaud en été (surchauffe). L'installateur doit réguler le système en fonction des différences de températures.
Qu'est-ce qui vous a motivé à travailler dans ce domaine ?
Quand j'ai voulu me lancer dans le domaine de l'énergie thermique solaire en 2001, personne n'y croyait réellement et il n'y avait pas grand-chose sur le marché belge. Or, à cette époque, on parlait beaucoup des accords de Kyoto, de la protection de l'environnement et surtout, ce qui est aussi très important à mon sens, de l'indépendance des pays consommateurs par rapport aux pays producteurs d'énergies fossiles, comme par exemple le pétrole et le gaz naturel. C'est en partie ce qui a éveillé mon intérêt mais c'était aussi un nouveau challenge, l'opportunité de faire quelque chose de différent tout en évoluant quelque part dans la continuité de mon travail.
Quelles sont les qualités requises pour être un bon installateur ?
Au départ, il faut avoir une bonne formation. C'est très important. Il faut être autodidacte, être prêt à s'investir et ne pas avoir peur de passer des soirées et des week-ends à se former.
L'installateur remplit des fonctions de technicien. Il doit être aussi bien bon manuel que bon intellectuel. C'est nécessaire pour pouvoir concevoir une installation, un schéma hydraulique, réguler ou dépanner. Il faut aussi savoir s'organiser, faire preuve d'ordre, de propreté et de rigueur tant sur chantier que dans le rangement de sa camionnette ou de son coffret à outils.
Il faut être débrouillard, avoir un esprit d'analyse et de logique. C'est très important. Sans logique, il est difficile de comprendre tout ce qui a trait à l'hydraulique et la régulation. Même si l'on comprend ou si l'on a étudié par cœur quelques fonctionnements, à partir du moment où il faut modifier ou ajouter quelque chose, c'est la catastrophe.
Dernier point important mais non de moindres, je fais un métier que j'aime. Beaucoup d'installateurs savent que je suis un passionné. En étant passionné, motivé, on arrive aussi à une qualité de travail supérieure.
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées dans ce travail ?
Au départ, c’était assez difficile parce que je ne connaissais rien aux métiers manuels. J’ai commencé par la base, ce qui veut dire pour un installateur, apprendre à abraser le cuivre, à souder l’acier ainsi que toutes les matières thermoplastiques.
Je me rappelle par exemple avoir eu mon premier cours de technique pour réguler les brûleurs en chauffage alors que je n’en avais encore jamais vu. J’ai fait mes patronats mais, ce qui m’a beaucoup aidé, c’est d'avoir été travaillé sur chantier par la suite. C'est là que j’ai réappris tout le métier de A à Z, du manœuvre à l’ouvrier spécialisé.
Dans le domaine de l’énergie solaire, lors de l’installation, la première difficulté c’est que la chaudière, c’est-à-dire les capteurs, se trouvent sur le toit. C’est un réel problème pour beaucoup de chauffagistes. Ils font alors appel soit à un ardoisier, soit à notre société. Nous avons innové un nouveau système en Belgique avec des grues pour installer directement les capteurs sur le toit. C’est très demandé.
Quelle est l’importance de la formation continuée ?
La formation, c’est ce qui rapporte le plus. J’y ai toujours cru à 100%. Le problème de l’installateur, c’est qu’il a besoin de temps. Il faut aussi l’aider financièrement, il y a tout un système qui a été mis en place dans ce sens et qui inclut notamment des chèques formation.
Malgré cela, beaucoup d’installateurs font des formations au compte goutte. C’est pourtant indispensable si l’on veut percer dans le métier. Il va y avoir de gros changements dans le domaine énergétique. Les énergies fossiles ne sont plus là pour des centaines d’années. Cela va dépendre du rythme et du profil de consommation de certains pays mais il y aura inévitablement un impact sur le travail d’installateur et celui qui ne veut pas s’adapter, notamment en se formant, sera très vite dépassé.
Quel avenir pour l'énergie thermique solaire ?
Il y a de l’avenir pour l’énergie thermique solaire et pour ses techniciens car il y a de plus en plus de clients pour ce type d’énergie. Il y a de plus en de plus de revues spécialisées et de salons d’énergie renouvelables en Belgique comme à l’étranger. Par ailleurs, il y a une grosse demande en Belgique dans le domaine du chauffage solaire, du chauffage de piscine et bientôt même de la climatisation. On voit aussi l’apparition de nouvelles sociétés qui intègrent un bureau d’études et font de la cogénération, c’est-à-dire une énergie qui produit aussi bien l’électricité que le thermique.