Mr Paolino, Glacier

Interview réalisée en avril 2006

Mr Paolino, vous êtes artisan glacier depuis combien de temps ?

Je suis glacier ambulant depuis plus de 10 ans et j'ai ouvert ce salon de dégustation à La Louvière. Je n'ai pas suivi de formation particulière. 

Quelles sont les aspects importants dont vous avez tenu compte au moment de vous lancer ?

La gestion est une dimension très importante pour réussir son projet. La recette entrante ne correspond pas aux bénéfices. Fabriquer la meilleure glace qui soit ne suffit pas, il faut y associer une qualité de gestionnaire rigoureux. Les investissements de départ sont très importants, on peut compter entre 50000 et 100000 euros pour le démarrage. La "turbine" qui permet de glacer et de mélanger coûte à elle seule entre 20000 et 30000 euros. Les charges de base sont toujours identiques que ce soit en haute ou en basse saison. Il est très important d'assurer le plus rapidement possible le paiement des charges, cela évite les mauvaises surprises et permet de mieux contrôler les flux. Suivre des cours de gestion c'est un des conseils que je donnerais à tous ceux qui veulent se lancer. Bien gérer c'est penser à tout, les dépenses, les stocks, le personnel, les charges parallèles, les fluctuations dans les recettes, les investissements,etc. La trésorerie doit être bien contrôlée. Au démarrage on fait face à l'inconnu, il faut être vigilant, le risque est grand, il faut faire de bons choix. Il faut savoir s'adapter. Dans la salle de dégustation, nous avons décidé d'offrir d'autres produits "taverne", ce qui nous permet de rester ouvert toute l'année.

En tant qu'indépendant, quelles sont les difficultés principales ?

Le poste salarial est lourd. Le salaire net que reçoit le personnel me coûte plus du double en réalité. Un mi-temps gagne en moyenne 650 euros net et me coûte près de 2000 euros. Les taxes sont imposantes. Le nombre d'heures de travail est important mais c'est un choix. L'autonomie que le statut d'indépendant implique a été un facteur décisif pour moi.

A quoi faut-il être attentif pour être un bon glacier ?

Les produits de base doivent être de très bonne qualité. Nous devons choisir le meilleur du produit que ce soit pour le chocolat, la vanille, la pistache, tout doit être excellent. Il ne faut pas hésiter sur ce point là. Mon comptoir offre 36 parfums différents. Au départ, on prend les goûts traditionnels comme la vanille, la fraise, le chocolat et ensuite on enrichit la palette en fonction des goûts que l'on peut identifier comme étant recherchés par le public. La stracciatella, la nutella, le spéculoos, le coco, etc. Certains produits plaisent plus que d'autres. J'ai observé ce qui se vendait sur le marché, j'ai goûté et j'ai tiré les conclusions qui me semblaient correspondre le mieux au public de la région. Il est important de savoir varier, de proposer des nouveautés chaque année.

Y a-t-il une variation saisonnière dans le choix des clients pour les parfums que vous offrez ?

Oui, en périodes de fortes chaleurs, ce sont les sorbets qui sont très prisés, mais les clients consomment durant toute l'année. On peut cependant identifier une haute et une basse saison. Durant la haute saison, les clients sont là depuis la fin de la matinée jusque très tard le soir. En basse saison les ventes sont plutôt concentrées sur le week-end. Le fait de proposer le produit en salon de dégustation fait que la glace est consommée à de multiples occasions et à différents moments de la journée, en famille, lors de balades en ville, après le restaurant, en sortie entre copains, pour terminer la soirée.

Comment se fabrique la glace ?

On part d'une base avec le lait et un parfum suivant un dosage de départ. Ensuite nous nuançons selon ce que l'on veut produire comme intensité de parfum. On crée le goût. On choisit les arômes de base et on y ajoute notre savoir-faire particulier.

Comment se passe une journée de travail ?

En haute saison, la journée commence vers 8h et se termine parfois vers minuit. Ce sont les journées les plus longues. On identifie les parfums à produire pour que l'offre au comptoir soit complète. Notre spécialité est la "granita", un sorbet au citron d'origine sicilienne. Nous veillons aussi à ce que nos glaces offrent réellement le goût qu'elles annoncent. Une glace à la fraise a un vrai goût de fraise. Les clients nous le disent souvent. Nous réalisons des gâteaux en glace mais leurs formes restent traditionnelles, nous ne sommes pas des sculpteurs ni des créateurs en volume.

Quelles sont les difficultés liées à la production de la glace ?

Il n'est pas facile de prévoir précisément quelle sera la consommation en goût et en quantité. On est tributaire du temps. Ce n'est pas un métier difficile en soi mais les journées sont parfois très longues et épuisantes. En haute saison, il nous arrive de travailler plus de 15h par jour et ce 7 jours sur 7. La chaleur et la position en station debout toute la journée c'est particulièrement fatiguant. Contrairement à ce que l'on peut imaginer, faire de la glace ne se fait pas dans une chambre froide, de plus, les moteurs des frigos et des machines dégagent de la chaleur.

Quelle est la différence entre le travail que demande la salle de dégustation et le commerce ambulant ?

Pour l'un, on attend le client et l'autre on va vers lui. Les offres de produit sont différentes également et les sources de fatigue également. Le stress en salle est élevé en période de haute saison. L'offre est beaucoup plus large dans le salon de dégustation. En salle nous pouvons diversifier à la fois les parfums mais également les présentations. Nous essayons de rendre la dégustation agréable aux yeux dans une ambiance très conviviale, les coupes sont très inventives, colorées, originales. Nous inventons des présentations qui font référence à d'autres plats, nous avons une glace pizza, spaghetti. Nous veillons à ce que nos produits soient les plus frais possibles.

D'où proviennent vos produits de base ?

Mes fournisseurs sont belges bien qu'eux se fournissent jusqu'en Italie.

Y a-t-il un service de contrôle particulier auquel vous êtes soumis ?

Avant de commencer mon entreprise, je me suis adressé au service d'hygiène pour vérifier quelles étaient les règles à respecter. C'est une très bonne chose, la rigueur dans la pratique est indispensable. Le service est venu nous rendre visite au départ et nous a accordé l'autorisation de lancer la production. Ils peuvent venir à tout moment opérer leur vérification mais en règle générale, l'autorisation de départ est valable pour 3 ans, à priori.

Comment voyez-vous la suite de votre entreprise ?

La concurrence existe mais la glace est un produit de plaisir et en salle de dégustation, elle privilégie la convivialité. Notre région du centre privilégie facilement ces aspects-là.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.