Mr Pascal Glinne, Directeur technique
Interview réalisée en décembre 2008 |
Pouvez-vous nous présenter brièvement la Fédération Francophone Belge de Ski ?
La F.F.B.S., dont les bureaux sont situés à Liège, comprend une quinzaine de clubs répartis dans les quatre coins de la région francophone du pays, ce qui représente plus ou moins 2500 membres. L’intérêt pour un club de ski de s’affilier à la fédération est important : la licence permet en effet de bénéficier d’une assurance à un prix défiant toute concurrence et ce durant tout l’hiver et partout dans le monde. D’autre part, il bénéficie de nombreux avantages auprès de nos partenaires pour des séjours en France, Suisse, Italie, Andorre, Canada… La F.F.B.S. est dirigée par un comité directeur composé d’un président, un vice-président, un secrétaire général, un trésorier et un directeur technique, moi-même.
Quel fut votre parcours avant de devenir directeur technique ?
J’ai commencé la formation de moniteur de ski en 1986. A l’époque, celle-ci n’était pas encore organisée par l’Adeps mais par l’Association des Moniteurs Belges de Ski (A.M.B.S.). Cette formation était toutefois reconnue par l’état français, ce qui est aussi le cas de celle de l’Adeps actuellement, ce qui fait que je pouvais enseigner le ski dans l’Hexagone. Grâce à ce diplôme, j’ai pu travailler en école de ski, durant cinq hivers, de la fin novembre jusqu’en avril. Les autres mois, je revenais en Belgique travailler dans un magasin spécialisé en sports. La dernière année, je me suis occupé de la gestion d’une école de ski pour le Club Med. Sans en avoir le titre, j’exerçais déjà des fonctions de directeur technique au sein d’une E.S.F. (École du Ski Français). En raison d’obligations familiales, j’ai ensuite mis le ski entre parenthèses. Certes, durant les vacances scolaires je travaillais encore comme temporaire en école de ski ou pour des clubs belges, mais sans plus. Et puis ma passion m’a rattrapé. En 2001, j’ai repris l’enseignement au sein d’un club belge et ensuite je me suis occupé d’une équipe de jeunes coureurs de ce club. Peu de temps après, la F.F.B.S. m’a contacté pour développer un projet à l’échelle de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Cet objectif consistait à développer le volet "compétition" et la formation des cadres. Ce projet m’a intéressé car il fallait mettre sur pied une nouvelle politique sportive et la structurer. Je m’y suis attelé, comme coordinateur, ceci bénévolement durant trois ans. Il y a un an, j’ai été officiellement nommé directeur technique, un poste nouvellement créé.
Aucune structure n’avait précédemment été mise en place pour développer le ski en Belgique ?
Du côté francophone, quasiment aucune. Je suis donc quasiment parti de zéro, avec l’aide de certains clubs. Il faut savoir que sur les 15 clubs affiliés, seuls quelques uns ont une vocation sportive. Les autres envisagent plus le ski comme une activité récréative en proposant des vacances à la neige. Auparavant, il n’y avait d’ailleurs aucune compétition spécifique pour les skieurs francophones. A partir de 2003, nous avons petit à petit concocté des programmes de détection mais aussi des entraînements pour les jeunes prometteurs. Quarante enfants, âgés entre 8 et 11 ans, ont ainsi, dans un premier temps, été repérés. Certains d’entre eux défendent aujourd’hui les couleurs nationales dans des compétitions internationales. Après cette phase de détection, la Fédération peut maintenant puiser dans le réservoir pour sélectionner des skieurs, de benjamins à juniors, qui sont, selon nous, susceptibles de devenir des champions. Tous les dimanches, sur une piste artificielle, ils reçoivent des entraînements adaptés par des entraîneurs professionnels, soit dans les clubs partenaires ou au sein de la sélection fédérale. Pendant les semaines de vacances scolaires, les coureurs s’entraînent en montagne. Les plus âgés, les juniors, s’apprêtent maintenant à aller défier des skieurs étrangers. Ce sera une bonne façon de jauger leur niveau.
Vous étiez-vous fixé un objectif précis lorsque vous avez accepté le poste ?
Oui, former de vrais champions sans complexe avec les pays alpins. Il a d'abord fallu changer la perception que les gens ont de notre sport. Beaucoup de gens skient, et la plupart considèrent cette discipline comme étant une activité uniquement de loisir. Je voulais contribuer à changer cette image et démontrer que c’est une activité sportive. C’est pour cela que l’une des premières mesures que j’ai prise a été d’instaurer des entraînements le dimanche, pour que ceux qui ne pratiquaient le ski qu’une semaine en hiver puissent le faire toute l’année sur piste artificielle. Depuis lors, beaucoup de jeunes qui pratiquaient d’autres sports que le ski ont maintenant définitivement opté pour notre discipline.
Avez-vous déjà eu des résultats concrets de cette nouvelle politique sportive ?
Deux de nos skieurs minimes ont brillé lors des championnats de Belgique qui ont eu lieu à Val Thorens, l’un en décrochant le titre de champion, l’autre en étant vice-champion. Le deuxième effet visible se remarque dans les compétitions belges : si auparavant 90% étaient des néerlandophones, maintenant c’est quasiment du 50-50. Enfin, trois de nos 13 skieurs sélectionnés sont maintenant repris dans l’équipe nationale belge qui n’était alors composée que de représentants du Nord du pays.
Quel est votre rôle en tant que directeur technique ?
Je coordonne la politique sportive de la F.F.B.S.. Cela sous-entend plusieurs missions :
- la planification du programme complet des skieurs repris par la fédération, leurs périodes d’entraînement et leurs périodes de compétition ;
- en concertation avec les entraîneurs et d’autres membres de la fédération, la sélection des skieurs susceptibles d’entrer en compte pour une sélection nationale ou olympique ;
- la définition de la politique sportive (en matière de détection, par exemple) ;
- la recherche de sponsors ;
- les relations publiques, notamment envers la presse ;
- la formation des cadres, ce programme est le second pôle d’activité de la fédération.
Je suis aussi en charge de l’organisation des formations de moniteurs de ski alpin, ce diplôme professionnel est reconnu au niveau européen et doit répondre à des critères stricts et précis. Ceci se fait en concertation avec différents techniciens au sein de la Fédération et aussi avec l'ADEPS.
Quel est votre rôle auprès des skieurs de haut niveau ?
Certains skieurs néerlandophones, qui font partie des meilleurs du pays, sont affiliés à un club repris au sein de la F.F.B.S. Mais ils ont leur propre encadrement. Je n’interfère donc nullement dans leur programme. Mon rôle auprès d’eux est plutôt d’ordre administratif, notamment dans la recherche de subsides ou de planification de compétitions.
Quelles difficultés rencontrez-vous dans l’exercice de votre fonction ?
Ce n’est pas toujours évident de communiquer avec les athlètes, qu’ils soient jeunes ou pas, et leur entourage direct, qu’il s’agisse du club, des parents ou des entraîneurs. Ensuite, il y a le manque de moyens financiers. C’est vrai dans beaucoup de sports et notamment dans le ski. Il faut pouvoir s’entourer d’entraîneurs compétents et les déplacements en montagne sont obligatoires. Des projets que je souhaiterais mettre en place sont freinés par l’aspect financier. Enfin, je citerais le manque criant d’infrastructures : en Belgique francophone, il n’existe qu’une seule piste couverte. Elle est située à Comines. J’aimerais bien évidemment qu’il y en ait d’autres mais les coûts pour la construction d’une telle infrastructure sont exorbitants. Dommage aussi qu’il n’existe pas de sport-études spécifique au ski, comme en Flandre, cela permettrait d’attirer plus de jeunes à notre sport. Tout ça reste donc à faire.
Et qu’appréciez-vous particulièrement dans votre fonction ?
La montagne et le ski sont deux passions. La compétition en est une autre. Pouvoir travailler dans ce secteur est un réel bonheur. Ensuite, je trouve très gratifiant le fait de transmettre son savoir et son expérience à des jeunes. C’est particulièrement agréable aussi de constater que certains d’entre eux progressent à grands pas mais c’est tout aussi enivrant de les amener au plus haut niveau qu’il leur est possible d’atteindre. Le sport est une école de vie et nous jouons un rôle éducatif essentiel. C’est très valorisant. Je suis aussi un homme de challenge et relever ce défi qui m’était proposé, partir de zéro et mettre au point une politique sportive, m’a de suite intéressé.