Mr Pierre Migisha, Journaliste

Interview réalisée en décembre 2008

Quel a été votre parcours scolaire et professionnel ?

Après mes études secondaires dans le général, je me suis dirigé vers l’ULB et le master en Information et communication dans le but de devenir journaliste. Dans le même temps, à 18 ans à peine, j’ai collaboré aux pages sportives du journal “La Libre Belgique“ pendant six mois puis à celles du journal “le Soir“ durant deux ans. J’exerçais cette activité en parallèle à mes études. En outre, au même moment, j’ai aussi frappé à la porte de RTL. A l’époque, le sport n’était pas fort développé sur la chaîne. Ma motivation m’a permis d’être intégré dans l’équipe de l’émission “Eurofoot“, une sorte de version belge de “Téléfoot“, créée par Philippe Henry. Celui-ci m’a d’ailleurs été d’un grand soutien tout au long de ma carrière. C’est lui qui m’a convaincu de garder un pied dans le métier alors que je souhaitais à un moment donné me concentrer exclusivement sur mes études.

Quand “Eurofoot“ s’est terminé, RTL m’a gardé pour travailler sur des sujets sportifs, prioritairement pour les journaux télévisés. A la fin de mes études, en 1994, j’ai définitivement été engagé dans la rédaction. Jusqu’en 1998, j’ai travaillé comme journaliste polyvalent pour la télé mais aussi pour la radio. Mes meilleurs souvenirs de l’époque restent d’avoir couvert les Jeux Olympiques d’Atlanta et la Coupe du monde de football en France. J’ai aussi couvert à cette période des sujets d’actualité générale. En 1998, je pensais avoir fait le tour de la question. RTL ne s’investissait pas énormément dans le sport : il n’y avait quasiment pas de match diffusé en direct. J’ai voulu me lancer un nouveau défi. Or il se fait qu’une occasion unique s’est présentée à moi : travailler pour l’Euro 2000 de football en tant que l’un des porte-parole du comité d’organisation. J’ai saisi cette opportunité. Cela fut une très chouette expérience.

A la fin de l’été 2000, une fois l’Euro terminé, je souhaitais réorienter à nouveau ma carrière. RTL-TVi, via son directeur des programmes de l’époque, Eddy De Wilde, a souhaité mon retour au bercail car la chaîne venait d’acquérir les droits de diffusion de la Champions League. Là, concrètement, on me demandait d’assurer en direct le commentaire des matchs. Je n’ai pas hésité un seul instant à réintégrer la rédaction. Aujourd’hui, 50% de mon temps de travail est consacré au commentaire des matchs de football, qu’ils soient de Champions League, de l’équipe nationale ou encore de coupe de Belgique. 40% concernent la réalisation de reportages sportifs divers (football, tennis, moto, etc.) pour le journal télévisé ou nos émissions sportives. Les 10% restants sont consacrés à des sujets autres que sportifs. En effet, je suis un journaliste avant tout et je suis donc mobilisable pour n’importe quel événement.

Après cette expérience à l’Euro 2000, dans quel secteur souhaitiez-vous vous réorienter ?

Je voulais rester dans le monde du sport. Travailler pour une fédération, pour un club ou même peut-être devenir agent de joueurs. Il n’est pas exclu que je le devienne un jour.

Pourquoi le sport ?

Je suis issu d’une famille où le sport a toujours occupé une place importante. J’ai moi-même joué au foot. J’ai aussi fait un peu d’athlétisme. J’adorais regarder le sport à la télé. Je ne ratais rien des grands matchs de football, des Grands Prix de Formule 1 ou encore de Roland Garros. Petit, j’analysais les programmes télé pour être sûr de ne rien rater.

Comment se prépare le commentaire d’un match de football ?

Tout d’abord, il faut se tenir au courant de l’actualité footballistique qu’elle soit belge ou européenne. Je suis continuellement les résultats des principaux championnats. Ainsi, je lis quotidiennement cinq journaux, trois francophones et deux néerlandophones, pour me tenir informé. En quelque sorte, j’entretiens mes connaissances. Je ne me considère pas comme un fin tacticien ou un fin technicien du football mais je pense avoir d’excellentes connaissances dans le domaine de l’histoire du jeu, du palmarès, des joueurs.
Je prépare des fiches, des sortes d’aide-mémoire, qui me permettent, au fil de la rencontre, de distiller quelques informations ou anecdotes sur les joueurs. Au stade, je collecte les dernières informations telle que notamment la composition des équipes. J’ai aussi une réunion de production durant laquelle on me tient informé des moments où la publicité sera lancée, des interviews, etc. Quand il s’agit d’une rencontre à l’étranger, on part le jour même sauf lorsque les voyages sont lointains. Une année, la finale de la Champions League a lieu à Moscou. Pour ce qui concerne les matchs de l’équipe nationale à l’étranger, l’Union Belge affrète un charter. Nous partons donc avec les joueurs et le staff la veille ou l’avant-veille de la rencontre. Ce que j’aime dans ce métier, c’est qu’il n’y a aucune routine. On bouge tout le temps.

Qu’est-ce qui pourrait s’avérer difficile ou lourd dans l’exercice de votre métier ?

L’enchaînement des rencontres. Les matchs se suivent à un rythme effréné. Dès qu’une rencontre est terminée, il faut déjà préparer la suivante. Mais pour moi, ce n’est pas vraiment un inconvénient, bien au contraire.

L’une des belles satisfactions de votre métier doit être de côtoyer de près les stars du ballon rond ?

Il fut un temps, quand je commençais à travailler, où il m’était vraiment agréable de discuter avec des vedettes du monde sportif. Maintenant, cela n’a plus le même attrait. Je ne fais pas ce métier pour cela, en tout cas. Comme chaîne de télévision ayant acquis les droits de la Champions League, nous pouvons interviewer à peu près n’importe quel joueur d’un grand club, à condition de s’y prendre à l’avance. Mais certaines stars, comme Cristiano Ronaldo, par exemple, sont plus difficilement accessibles. Les grands clubs sont en tout cas très bien organisés dans les contacts avec les médias.

A force de côtoyer les joueurs, arrivez-vous à garder votre esprit critique ?

C’est clair qu’il faut être proche des joueurs pour avoir des informations, pour comprendre le milieu, mais en même temps le fait de boire un verre avec un joueur n’empêche pas de dire le lendemain qu’il a mal joué. Ceci dit, en télévision, nous couvrons les choses superficiellement. On fait du direct. Nous n’avons pas le recul nécessaire, comme la presse écrite, pour procéder à une analyse critique de chaque joueur individuellement.

Qu’est-ce qui vous plaît particulièrement dans votre profession ?

J’adore commenter en direct. C’est grisant. Cela a aussi un petit côté stressant mais j’ai besoin de ce stress. C’est Michel Drucker qui a dit qu’après 30 ans de télévision, il ressentait toujours le stress avant chaque émission. Il a rajouté que le jour où il ne le ressentirait plus il trouverait cela inquiétant. J’adhère totalement à cela. J’aime bien aussi voyager. Mon métier m’aura permis de visiter plein de villes différentes, beaucoup de pays où je n’aurais probablement guère mis les pieds comme touriste, comme par exemple l’Azerbaïdjan, l’Algérie, l’Estonie ou encore l’Arménie pour n’en citer que quelques-uns. Ce n’est pas négligeable. Enfin, l’équipe des sports de RTL est relativement jeune. Il y a vraiment une excellente ambiance entre nous. On a tous la même ambition : faire la meilleure émission, la meilleure retransmission ou le meilleur reportage possible.

Que diriez-vous à un futur journaliste sportif ?

La formation, quoique nécessaire, n’est pas tout. Il est important de bien valoriser ses stages. Je me souviens particulièrement de l’un que j’avais pu faire à l’Agence France-Presse (AFP) et qui m’a appris la rigueur. Il faut aussi essayer de commencer au plus tôt les collaborations et saisir toutes les occasions qui permettent d’approcher les médias. Il y en a suffisamment de nos jours que pour pouvoir mettre le pied à l’étrier. Il faut aussi se montrer persévérant, ne pas baisser les bras trop facilement lorsque certaines portes se ferment.

Quel est le profil des journalistes que RTL engage ?

Le recrutement ne figure pas dans mes attributions. Je peux juste dire que les qualités essentielles pour faire partie d’un service des sports comme celui de RTL, outre les connaissances journalistiques, sont la curiosité, la passion de tous les sports et le dynamisme. A côté de cela, il y a aussi les connaissances sportives que l’on a pu acquérir par soi-même. Et puis, il ne faut pas négliger l’aspect vocal. Il faut bien évidemment pouvoir s’exprimer avec aisance et posséder une belle voix ou tout du moins une voix qui passe bien en télé et en radio.

Pour terminer, quel fut le plus beau match qu’il vous a été donné de commenter ?

Anderlecht-Manchester United lors de la fabuleuse campagne des Mauves en Champions League en 2000-2001. Par contre, chaque contre-performance des Diables Rouges est plutôt déprimante. Et, jusqu’il y a peu, leurs derniers matchs n’avaient pas été les plus emballants à commenter. Heureusement, cela semble aller mieux !

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.