Mr Zoltan Tamas Nagy, Herpétologiste

Pouvez-vous expliquer en quoi consiste le métier d’herpétologiste ?

L’herpétologie est une branche de la zoologie qui traite des amphibiens (environ 7000 espèces dont les tritons, grenouilles et crapauds, par exemple) et des reptiles (plus de 9600 espèces connues parmi lesquelles les serpents, les lézards, les tortues et les crocodiles). Un herpétologiste est un expert dans ces matières. 

Bien que les amphibiens et les reptiles n’aient pas beaucoup de traits communs, l’herpétologie est historiquement liée à ces animaux, notamment pour des raisons pratiques, car beaucoup d’amphibiens et de reptiles peuvent être trouvés aux mêmes endroits (dans les habitats aquatiques, semi-aquatiques et terrestres, proches des sols et sous-sols) ou en utilisant des méthodes de capture similaires.  

L’herpétologiste peut se spécialiser dans l’étude de la diversité et la systématique d’un groupe d’espèces spécifique, ou encore dans l’écologie des populations ou communautés d’amphibiens et de reptiles. Il peut travailler sur des projets de conservation, réaliser des études en biologie moléculaire, génétique, physiologie, biomécanique, etc. Malheureusement, il y a peu de débouchés en herpétologie, c’est pourquoi certains herpétologistes se tournent vers l’enseignement ou d’autres branches de la biologie. Il existe également un grand nombre d’amateurs dans ce domaine. 

Quel est votre travail au sein de l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique ? 

En 2007, j’ai été engagé avec trois autres chercheurs pour travailler pour le JEMU, une unité de recherche expérimentale et moléculaire, menée conjointement par l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique et l‘AfricaMuséum. Nous travaillons en collaboration avec beaucoup d’autres scientifiques, surtout des taxonomistes, afin d’évaluer la diversité des groupes d’animaux (vertébrés et invertébrés) et de déduire des relations phylogénétiques ou généalogique. Nos analyses portent généralement sur la génétique moléculaire. C’est très enrichissant de travailler en collaboration avec des experts de domaines différents ; on peut apprendre beaucoup de ces échanges. 

A côté de cela, j’ai aussi d’autres projets personnels en cours, principalement ciblés sur les serpents de Madagascar et la faune reptilienne d’Afrique centrale. 

Plus concrètement, les tâches sont diverses : travail de laboratoire, analyse et évaluation de données, interprétation des résultats, rédaction d’articles scientifiques, préparation et organisation d’expéditions sur le terrain, participation à des réunions scientifiques, etc. C’est très différent d’un travail classique de 9 à 17h et cela demande un investissement considérable en temps. 

Quel est votre parcours ?

Après avoir obtenu mon master en Hongrie (Université de Szeged), je me suis rendu en Allemagne (Université d’Heidelberg) afin de faire mon doctorat. Cette étape est vraiment un must dans la carrière d’un chercheur. Je travaillais sur les relations évolutives des serpents du Vieux Monde, et plus spécifiquement sur les serpents communément appelés “évolués“, d’Europe, du Moyen Orient et d’Afrique, en utilisant des marqueurs génétiques moléculaires (il s’agissait d’un domaine émergent très prometteur au début des années 2000). Lorsque j’ai obtenu mon doctorat en 2004, j’ai travaillé pendant deux ans en Hongrie, dans un institut de recherche en sciences de la pêche. Je travaille à l’Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique depuis mi-2007. 

Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce métier ?

J’ai décidé d’étudier la biologie car j’étais intéressé par la zoologie de façon générale, et surtout, je voulais en savoir un peu plus sur la diversité animale de notre planète. Depuis mon enfance, je suis fasciné par les reptiles, et plus particulièrement par les serpents. Ils sont tellement différents des êtres humains (aspect, façon de vivre, etc.) et il y a tellement de particularités au sein de ces animaux.

Cependant, j’ai toujours été plus intéressé par les serpents non-venimeux, surtout les colubridés. Je trouve qu’il y a trop d’amateurs irresponsables qui possèdent des serpents venimeux (y compris les mortels), ce qui ne véhicule pas une image très positive de l’herpétologie. C’est d’ailleurs assez étrange qu’on ne parle que de ces serpents dans les médias, dans des contextes défavorables (morsures, par exemple), alors qu’il existe tellement de serpents non-venimeux.  

Il est aussi intéressant de constater que ces dernières années, grâce aux méthodes moléculaires, le nombre de descriptions d’amphibiens et de reptiles, jusque là inconnus, augmente considérablement. En même temps, l’extinction de ces espèces augmente également à cause de la perte de leur habitat et des maladies, surtout chez les amphibiens. Nous sommes à un stade où bon nombre d’espèces s’éteindront avant même que nous ayons pu les découvrir. Ce constat est peut-être l’occasion de faire appel à plus d’herpétologistes. Heureusement, on trouve encore beaucoup de jeunes, motivés et talentueux, y compris dans les pays avec une grande diversité d’amphibiens et de reptiles, comme le Brésil ou la Turquie. 

Quelles sont les compétences que doit posséder un herpétologiste ? 

Cela dépend du domaine dans lequel on se spécialise. Une combinaison de compétences de terrain et de laboratoire est toujours appréciée. Il ne faut pas avoir peur de travailler dans la boue et toute la nuit si nécessaire mais il faut également faire preuve de précision, de soin et pouvoir travailler de façon autonome, que ce soit à l’intérieur ou en plein air. 

Est-ce que vous travaillez principalement dans un laboratoire, dans un bureau ou sur le terrain ?

Un peu des trois. J’essaie de travailler sur le terrain tous les ans ou tous les deux ans, mais mon travail quotidien a lieu devant un ordinateur (évaluer des données, correspondre avec des collègues, écrire des articles, etc.) et au laboratoire. 

Quels sont les conseils que vous donneriez à une personne qui veut devenir zoologiste, et plus particulièrement herpétologiste ?

Je lui conseillerais de se spécialiser dans un groupe d’espèces ou un sujet en particulier le plus tôt possible, d’en savoir le plus possible, tout en restant prêt à changer à tout moment. 
Se former sur le terrain et dans un laboratoire est toujours souhaitable. Il existe tellement de possibilités de stages, d’intérim ou de volontariat pour des projets menés dans des endroits passionnants du monde !
 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.