Mr Adrien Deliège,
Chercheur en mathématiques
Interview réalisée en octobre 2015 |
Quel a été votre parcours scolaire ?
Après mon master en Sciences mathématiques à finalité approfondie, j’ai obtenu une bourse d’aspirant FNRS (Fonds National de Recherche Scientifique). Depuis lors, je suis doctorant à l’ULiège, j’ai fait deux années de thèse et il m’en reste encore deux à faire.
Quel est le sujet de votre thèse "El Nino, quand les mathématiques rythment les catastrophes climatiques" qui a vous a valu de recevoir le prix "Ma thèse en 180 secondes" ?
Ma thèse s’articule autour d’un outil mathématique, à savoir les ondelettes. Cela permet d’analyser de nombreux jeux de données et d’en tirer de nouvelles informations. Une partie de ma thèse est consacrée à l’étude du phénomène El Niño (phénomène climatique qui se traduit par une hausse de la température à la surface de l’eau de l’est de l’océan Pacifique, autour de l’équateur). Il s’agit principalement d’analyser la température de l’Océan Pacifique. J’essaie d’en extraire les composantes principales, de laisser le bruit (les parasites en quelque sorte) de côté et d’extrapoler aussi bien que possible ces composantes pour, à terme, essayer de prédire l’arrivée de phénomènes semblables. J’ai également analysé d’autres séries de températures (de l’air, dans des stations météos européennes) d’un point de vue différent pour voir si leur irrégularité était liée à leur type de climat et aux variations de pression locales.
Brièvement, quelle est votre méthodologie de travail une fois le thème trouvé ?
Il faut commencer par de la bibliographie. Ce n’est pas ce qu’il y a de plus amusant, mais il faut savoir où en est l’état de la recherche en la matière avant de se lancer et d’entrevoir le grain de sel qu’on pourrait y apporter. Ensuite, une fois que la problématique est bien définie, il faut mettre au point la méthode d’analyse et aiguiser ses outils pour qu’ils soient aussi bien adaptés que possible au sujet que l’on souhaite étudier. Il faut ensuite faire de nombreux tests, vérifier les résultats, voir comment les améliorer, approfondir le sujet et déterminer jusqu’où on est capables d’aller avec notre méthode. Une fois qu’on a fait tout ce qu’on a pu, on rédige un article, on présente le travail à des conférences et on essaie de trouver des collaborateurs pour améliorer le tout, ou se lancer dans d’autres sujets.
En quoi consiste votre travail au quotidien ?
Je lis des articles pour me tenir au courant des dernières avancées. Je fais des codes pour analyser mes données, je regarde ce qui est bon/moins bon, j’essaie de résoudre le problème, je travaille sur mon sujet. Je rédige des articles, je vais à des conférences pour présenter mon travail. Je donne des séances d’exercices dans certains cours également. Combiner recherche et enseignement, je trouve que c’est une vie très intéressante.
Combien y-a-t-il de chercheurs en mathématiques au sein de l’ULiège ?
Il y a une vingtaine de doctorants et une dizaine de professeurs. De temps à autres, il y a des post-doctorants temporaires.
Pouvez-vous nous citer des thèmes de recherches en mathématiques effectuées par des chercheurs en mathématiques ?
Analyse fonctionnelle, analyse multifractale, topologie algébrique, combinatoire des mots, géométrie différentielle, statistique robuste, algèbres de contact, dualité de Stone, etc. Ce sont quelques exemples de ce qui est étudié à l’ULiège. Sinon, au total, dans le reste du monde, des centaines de thèmes sont le sujet de nombreuses recherches en mathématiques. Il est d’ailleurs impossible pour un mathématicien du 21ème siècle de connaitre toutes les mathématiques tant les domaines sont nombreux et variés.
Quelles peuvent être les sources de financement des chercheurs ?
Principalement les Universités et le FNRS. Je pense qu’il est aussi possible d’être financé par certaines entreprises. Cependant, il y a somme toute assez peu de chercheurs en Belgique, et il est de plus en plus difficile de se faire une place et de la garder dans ce milieu, faute de budget.
Peut-on, selon vous, exercer comme chercheur toute sa vie professionnelle ?
Oui bien sûr, mais c’est très difficile d’avoir une place de chercheur (ou professeur) définitif dans une Université. De plus, il faut savoir sans cesse rebondir quand les recherches stagnent un peu.