Mme Michèle Ancion,
Restauratrice de meubles

Interview réalisée en septembre 2011

Quel a été votre parcours ?

J'ai fait des études universitaires. J'ai un master en histoire de l'art. J'ai travaillé deux ans à la Ville de Liège, puis j'ai eu 3 enfants que j'ai élevés.

N'étant plus dans le circuit du travail, j'ai refait une formation de 3 ans de restauratrice de meubles au Château Massart, à Liège, afin de pouvoir travailler chez moi tout en restant disponible pour la famille. J'ai ensuite fait des stages de toutes sortes afin d'affiner cette formation (stage de tournage, stage de marquèterie à Versailles, stage d'expertise de mobilier) et puis je me suis lancée et j'ai fait "Antica Namur" en 2001, pour la première fois. Depuis, j'y suis chaque année.

Qu'est-ce qui vous a attiré dans la métier de restauratrice de meubles ?

Le travail du bois et le fait de redonner vie à des meubles qui avaient subi les marasmes du temps. Je fais des photos avant et après et le résultat est parfois extraordinaire.

En quoi consiste votre métier concrètement ? Les différentes étapes ?

En général, je travaille sur plusieurs meubles à la fois ; ainsi lorsque l'un est immobilisé par un collage, je peux travailler sur un autre. Chaque meuble est différent et les réparations demandent parfois de la réflexion ; c'est ce qui est amusant dans ce métier.

Je commence par faire le travail qui engendre le plus de poussières (mettre des bois à mesure) et le plus de force avant d'entamer les restaurations. Le métier de restaurateur est souvent un travail minutieux et méticuleux. Je polis dans un autre local, là où il n'y a pas de poussières.

Ensuite, je nettoie le meuble et inspecte les différentes réparations qu'il nécessite, que ce soit au niveau du placage ou du bois massif ; parfois il faut faire les deux. Je cherche les bois ou placages avec une veine de bois qui puisse se fondre dans celle du meuble. Je fais les découpes et encolle. Parfois il faut resculpter, s'il s'agit d'un pied de meuble ou d'une moulure. Il faut ensuite reteinter afin d'obtenir la même teinte que l'ensemble et faire la finition. S'il s'agit de placage, il faut bouche-porer avant de polir à l'ancienne. S'il s'agit de bois massif, vernir ou cirer selon les cas. Ensuite les finitions au niveau des poignées, boutons ou serrures (il faut parfois relimer des clés ou réparer les serrures).

Quelles sont les techniques utilisées ? Les outils avec lesquels vous travaillez ?

J'ai une combinée à bois afin de raboter et mettre les bois à mesure. J'utilise ensuite de petits outils électriques comme les ponceuses ou scies. Ensuite, il y a les ciseaux à bois, les gouges pour sculpter.

J'ai également un tour à bois lorsqu'il faut tourner des éléments perdus. Néanmoins, j'utilise toujours des colles anciennes : à chaud d'os et de nerfs, la colle de peau de lapin pour la dorure et, à froid, la colle de poisson. En restauration, il faut toujours appliquer le principe que l'on peut toujours revenir en arrière. Les colles au polyuréthane sont proscrites.

Suivez-vous toujours des formations ?

Oui, j'ai fait trois formations de dorure à la feuille pour restaurer les cadres et une formation de dorure sur cuir pour restaurer les cuirs des bureaux et écritoires.

Vous effectuez également des travaux de dorure, d'expertise. Parlez-nous de ces autres fonctions ?

 Je restaure les cadres où il y a des manques (moulages en silicone afin de reprendre des empreintes et refaire les éléments manquants) et je les redore à la feuille en leur donnant une patine afin que la restauration s'intègre dans l'ensemble sans choquer.

J'ai ensuite fait un stage de dorure sur cuir et me suis équipée afin de la réaliser moi-même, car j'aime finir un meuble moi-même. C'est ainsi que j'ai également appris à canner (le cannage consiste en l’action de garnir un siège avec des lanières de canne, c’est-à-dire du rotin filé, entrelacées) les chaises afin de les terminer moi-même (je ne paille pas et je ne fais pas le garnissage).

Parfois, on me demande des renseignements sur les meubles. Je reconnais facilement les bois, les styles et s'il s'agit de meubles d'époque ou de style. Je peux faire des estimations bien que les prix changent beaucoup.

Qui peut faire appel à vos services ?

N'importe qui, des particuliers, comme des professionnels.

Quelles sont les qualités à posséder pour devenir restauratrice de meubles ?

La persévérance, la minutie, la réflexion et la patience, car un meuble se travaille par étape et il ne faut pas aller plus vite qu'il ne faut.

Qu'est-ce que vous appréciez le plus dans votre travail ?

Le fait de voir un meuble redevenir beau et repartir dans un intérieur. Cela me donne une immense satisfaction.

Quels sont les conseils que vous donneriez à une personne qui veut se lancer ?

C'est un travail magnifique, mais attention, à l'heure actuelle, les antiquités n'ont plus la cote et nombre de restaurateurs n'ont pas assez de travail.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.