Interview anonyme,
Juriste dans une banque
Comment sont recrutés les juristes dans le secteur bancaire ?
Au niveau de la banque où je travaille, certains étudiants sont contactés à la fin de leurs études et d'autres diplômés nous envoient des candidatures spontanées.
Quels diplômés la banque engage-t-elle de préférence ?
Il n'y a aucun a priori de diplôme On vise davantage des personnes que leur diplôme. A titre d'exemple, sur le dernier recrutement de quinze stagiaires, il y avait quatre masters en droit.
Après le stage, le diplômé universitaire est-il directement engagé ?
Il y a des examens de stage qui sont relativement sévères mais ceux qui effectuent leur stage sérieusement réussissent les examens. Notre formation est d'ailleurs fort recherchée et certains stagiaires sont sollicités ailleurs.
Y a-t-il des spécialisations souhaitées ?
Dans le monde bancaire, le master en droit représente une formation intéressante. Des spécialisations en droit économique et en fiscalité constituent des atouts. Les fiscalistes sont très recherchés. Ce qui est primordial c'est de connaître au moins les deux langues nationales.
Le juriste est-il bien préparé par ses études universitaires à exercer une fonction dans une banque ?
Le juriste a une formation de base importante. Il sait ce qu'est une hypothèque, un gage de fonds de commerce, etc. Néanmoins, je trouve qu'une formation de deux ou trois ans au barreau constituent une expérience intéressante.
Quel a été votre parcours professionnel ?
J'ai acquis une expérience de huit ans au barreau avant d'être recruté par la banque pour diriger le service contentieux pur. Actuellement, je suis responsable du département crédit qui comprend entre autre chose le département contentieux mais également tous les services administratifs qui organisent la mise au point des crédits, leur surveillance, leur modification, etc. Ce sont des fonctions à relativement fort contenu juridique même si elles ne font pas appel à des études approfondies de droit dans la mesure où je n'ai pas l'occasion de me pencher sur des problèmes purement juridiques. Nous avons un département juridique à administration de Bruxelles qui peut nous offrir ce genre de service.
En quoi consiste votre travail personnel ?
Mon rôle essentiel est un rôle de management puisque je suis responsable d'un département qui compte 80 personnes. En tant que juriste, je lis tout le courrier qui émane des avocats de la banque pour me mettre au courant des avancements des litiges en matière de récupération de créance, de litiges avec les clients quand la banque a commis une erreur dans l'exécution d'un ordre, ou qu'elle a commis un retard dans une opération. Le juriste d'entreprise délimite les responsabilités et ce qu'on peut craindre ou espérer d'une procédure judiciaire. J'ai de nombreux contacts téléphoniques de la part de directeurs d'agence qui m'interpellent dans tous les domaines : constitution de société, changement de société, réalisation de sûreté en matière de crédit, régimes matrimoniaux, problèmes de succession, de chèques, de lettres de change, délais de prescription, etc. La matière est vaste.
En général, le juriste d'entreprise est le spécialiste des affaires délicates. Il est consulté pour l'évaluation des risques pour la banque au point de vue dommages et intérêts. Quand un client important a des problèmes, je suis convoqué à une réunion de négociation afin d'envisager les mesures à prendre pour le futur.
Que font les juristes engagés dans les banques ?
Certains juristes sont occupés au service contentieux qui est le service chargé de récupérer les créances exigibles. Cela implique des contacts avec les avocats. Il y a d'autres outils de récupération tels que les sociétés de récupération, la voie d'huissier ou des accords amiables avec le débiteur.
Il y a une service très important dans une banque, qui est le service de secrétariat crédit. C'est le service qui est chargé de la mise au point de conventions en matière de crédit. Qui dit convention dit fatalement juriste. Les conventions d'ouverture de crédit prévoient des sûretés qui doivent être mises au point (hypothèques, cautions, etc.). Le personnel sait ce qu'il doit faire dans 95% des cas mais le juriste pourra utilement apporter son expérience et son savoir-faire pour les cas plus inhabituels. Par exemple, transfert d'hypothèque d'une personne privée à une société à constituer, mise au point de conventions avec d'autres banques, exécution d'un mandat d'hypothèque.
Certains juristes sont également engagés au département commerce extérieur et traitent de toutes les opérations avec l'étranger : opérations de change, crédits documentaires, mais il s'agit d'une fonction qui ne requiert pas spécifiquement un diplôme juridique.
De nombreux juristes sont directeurs d'agence, et au niveau de la direction de notre siège, le directeur adjoint et le sous-directeur sont juristes.
Quel est le profil du juriste engagé dans une banque ?
Nous avons besoin de tous les profils. La banque engage des commerciaux mais, par exemple, pour s'occuper du service contentieux, elle préférera quelqu'un de moins commercial et de plus rigoureux.
Quels sont les avantages du secteur bancaire ?
En principe, c'est un secteur qui est réputé pour être stable au point de vue de l'emploi. La banque n'est plus en période de recrutement intensif mais néanmoins quand la banque engage, elle recherche de préférence des universitaires. Ils sont relativement bien payés. L'universitaire qui entre dans la banque dans le cadre d'un stage a la rémunération d'un chef de service.
Quels sont les horaires de travail ?
Nous avons des plages horaires qui se situent entre 8 heures et 16h30 mais comme la plupart des cadres, je travaille plus. Le week-end, c'est exceptionnel. Je suis aussi amené à voyager pour la banque, à raison de deux ou trois fois par an.