Mr Sébastien Pereau, Economiste

Interview réalisée en janvier 2009

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis un économiste qui a travaillé, de 2001 à 2008, à la Cellule économie sociale du SPF Intégration sociale, lutte contre la pauvreté et économie sociale. Depuis deux ans, j'assure maintenant la fonction de secrétaire général à ConcertES (Concertation francophone de l'Economie Sociale), fondée en 2005.

D'où vous vient cet intérêt pour l'économie sociale ?

Quand on est jeune, on est souvent idéaliste, on veut changer le monde. C'était mon cas.

Et comment définiriez-vous l'économie sociale ?

Il s'agit d'une manière originale de penser et de pratiquer l’économie avec une finalité qui n’est pas le profit mais une plus-value sociétale. L’économie sociale est avant tout "économique" si on considère le champ économique comme celui de la production et de la distribution de biens et services nécessaires et aptes à rencontrer les besoins humains. Ce secteur, qui se définit toujours par rapport à une finalité, est transversal à tous les secteurs examinés dans le prisme de l’économie. Il est une alternative, qui ne se veut pas exclusive mais qui collabore avec le secteur privé et vient souvent en appui des politiques publiques.

Quels organismes peuvent être étiquetés "économie sociale" ?

Les ASBL à pertinence économique, les sociétés coopératives agréées par le Conseil National de la Coopération, les Entreprises d’Insertion (EI), les Entreprises de Travail Adapté (ETA) et les Entreprises de Formation par le Travail (EFT), les Sociétés à Finalité Sociale (SFS), les mutuelles et coopératives d’assurance, les entreprises soutenues par la Sowecsom.

Quels sont les objectifs de ConcertES ?

ConcertES veut établir un pont, être un lieu de rencontre entre les différentes initiatives et fédérations d'économie sociale mais veut aussi développer une analyse sur une série de questions touchant à l’économie sociale par la mise sur pied de groupes de travail thématiques. Nous voulons aussi représenter et défendre le secteur de l’économie sociale auprès de toute instance publique et au sein d’instances consultatives et jouer un rôle d’articulation entre le secteur et les pouvoirs publics.

On confond souvent l'économie sociale et le non-marchand. Quelles sont les différences ?

Ces deux concepts ne désignent pas une même réalité, même s'ils se recouvrent partiellement. Ainsi l'économie sociale, en vertu du principe d'autonomie de gestion, ne se retrouve jamais dans le secteur public comme peut le faire le non-marchand. Par contre elle peut, au contraire du non-marchand, faire appel à des ressources exclusivement marchandes.

Existe-t-il des interactions entre l'économie classique et l'économie sociale ?

Oui. Elles peuvent même donner lieu à un enrichissement mutuel. Certains diront que les entreprises de l'économie sociale apprennent, au contact des entreprises à but lucratif, à se professionnaliser. Les entreprises à but lucratif, au contact des entreprises de l'économie sociale, commencent quant à elles à prendre en compte des considérations éthiques dans les échanges économiques.

Depuis 2008, ConcertES a mis sur pied un observatoire de l’économie sociale wallonne. Quel est son but ?

Il a pour objectif d’appréhender la complexité du secteur, les nombreux statuts, secteurs d’activités, finalités et publics, dont l'économie sociale tire à la fois richesse et diversité. Il vise à rendre mesurables, et comparables, les principes de l’économie sociale diversement déclinés au travers des pratiques de ses acteurs. L’enjeu de l'observatoire est double : mesurer l’économie sociale (pour lui assurer la place qui lui revient au coeur du développement économique de nos régions) et la définir par ses principes et ses pratiques mises en oeuvre (pour lui permettre la reconnaissance des plus-values sociétales qu’elle génère et la promotion des valeurs qu’elle défend). ConcertES développe différents partenariats avec les grands fichiers nationaux (ONSS, TVA, Banque Nationale, Centrale des bilans, administrations fédérales et régionales) de manière à rassembler toutes les informations pertinentes pour présenter des clichés panoramiques du secteur afin de comparer ses indicateurs clés à ceux de l’économie en général. Au-delà des indicateurs économiques importants qui seront à la disposition de l’ensemble des fédérations et qui leur permettront de mener diverses analyses et études prospectives, l’objectif de l’observatoire est également de développer des indicateurs permettant d’évaluer les plus-values extra-économiques générées par les entreprises du secteur.

L'économie sociale est-elle appelée à se développer encore et toujours ?

Oui très certainement dans la mesure où de plus en plus de consommateurs souhaitent trouver des produits ou services "éthiques", ce que peuvent leur offrir les entreprises adhérant aux valeurs de l'économie sociale. S’il n’existe pas de reconnaissance globale pour l’économie sociale, l’obtention de certains agréments particuliers est signe d’appartenance à l’économie sociale. 

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.