Sébastien Risse, Eco-designer
Interview réalisée en décembre 2024 |
Via le concept KIU (pour « Keep In Use »), vous proposez toute une gamme d’objets issus de la récupération. Quels sont-ils et quelle est leur provenance ?
Nous avons récupéré de véritables pièces issues des sports mécaniques, principalement des morceaux de carbone, pour les transformer en objets uniques : des lampes, des bracelets, des pendentifs, des porte-clés et des horloges. Nous offrons ainsi la possibilité de s’offrir un authentique morceau de voiture/moto de course ! Un QR code fourni avec l’objet permet au client d’accéder à toutes les informations (historique, photos, etc.), ce qui lui permet de découvrir la provenance de son achat.
Pouvez-vous nous citer quelques exemples de ces objets ?
Nous avons créé un porte-clés comprenant un morceau de carbone de la F1 Williams pilotée par Jacques Villeneuve en 1998. Nous en avons un autre avec du carbone de la BMW de la WRT pilotée par Valentino Rossi en 2023. Nous avons aussi un bracelet constitué de carbone de la F1 Ferrari pilotée par Carlos Sainz en 2021.
Pour célébrer les 100 du Circuit de Spa-Francorchamps, nous avons créé une lampe Cube avec finitions latérales en fibre de carbone upcyclée de voitures de course. Nous avons donc développé en étroite collaboration avec l'équipe du circuit cette série limitée et numérotée de 100 lampes avec son décor exclusif qui rend hommage aux multiples courses et à l'évolution du plus beau circuit du monde.
Quels types de matériaux utilisez-vous ?
Nous travaillons beaucoup avec le carbone. Nous apportons une attention toute particulière à la sélection des matériaux que nous utilisons, à leur impact environnemental, leur histoire, leurs caractéristiques et privilégions les matériaux les plus nobles et à l'empreinte écologique réduite, comme les biosourcés, durables, upcyclés ou issus de chutes de production.
Pourquoi le sport automobile et pourquoi le carbone ?
Mon collègue Aurélien Bory et moi-même, co-fondateurs du bureau de design IDcas, sommes tous les deux des designers passionnés de sports mécaniques. Nous avons constaté que le carbone, très utilisé dans cet univers pour ses caractéristiques techniques avancées (légèreté, solidité), devenait un vrai problème quand les pièces ne sont plus utilisables. L'enfouissement ou l'incinération ne sont pas pour nous des solutions viables et nous avons donc réfléchi à de nouvelles opportunités pour valoriser ce matériau. Avec KIU, c'est notre expérience de plus de quinze ans en design industriel que nous mettons au service du développement d’objets.
Comment récupérez-vous ce carbone ?
Auprès des écuries de course auto/moto (telles que Comtoyou racing, Boutsen VDS, WRT, AGP Akkodis ou AC Motorsport) et les circuits (Spa-Francorchamps, Le Mans, Magny-Cours) pour récupérer les pièces qui ne sont plus utilisables. Ces pièces ont vécu les compétitions, les bagarres, les podiums. C’est cette histoire que nous conservons à travers nos produits et que nous transmettons.
Quel était votre objectif en vous lançant dans cette activité ?
Trouver des solutions au problème de l'impact environnemental de certains matériaux à travers une démarche de design, en particulier les composites qui sont très compliqués à réutiliser.
Pouvez-vous nous décrire plus précisément votre travail au quotidien et celui de votre collègue ?
Je m’assure du suivi de projet, de l’organisation des plannings, sans oublier un peu de création et de modélisation 3D. Relever des défis et trouver des solutions aux besoins de nos clients sont mes motivations. Mettre en place et optimiser les process de production font également partie de mon quotidien.
Mon collègue s’occupe plus particulièrement de la modélisation 3D, de la découpeuse et fraiseuse numérique, de l’imprimante 3D résine ou fil. Bien que nous mettions un point d’honneur à tout faire nous-mêmes, nous envisageons de trouver des solutions pour semi-industrialiser notre production.
Quels outils utilisez-vous ?
Les technologies de découpe au jet d’eau ou au laser, l’impression 3D en matière biosourcée, la réalité virtuelle sont autant d’améliorations dans notre process de création. En parallèle de ces solutions technologiques innovantes, nous accordons également beaucoup d’importance au savoir-faire et au travail artisanal.
Nous réalisons l’assemblage de nos produits dans nos locaux. Nous avons ainsi une parfaite maitrise de la qualité et une meilleure flexibilité.
Existerait-il une journée type ?
Pas vraiment. Notre quotidien est rythmé par une grande variété de projets, de l'illustration graphique au prototypage, en passant par la modélisation 3D et les formations.