Mme Vanessa Torino, Educatrice

Interview réalisée en janvier 2004

Educatrice à l'Institut Médico Pédagogique de Decroly.

En quoi votre fonction consiste-t-elle ? 

Je travaille dans un centre d'hébergement (internat et semi-internat) et j'encadre un groupe d'enfants dits "en difficulté" âgés de 6 à 11 ans. Les enfants y séjournent toute la semaine et certains, dont la situation familiale est critique, restent même un week-end sur deux (par décision judiciaire). La durée du séjour varie selon les enfants. Nous recréons un cadre familial stable et nous les accompagnons dans leurs gestes quotidiens. 

Nous sommes trois éducateurs à travailler en équipe. Les deux autres s'occupent des adolescents (de 12 à 18 ans). Ces enfants ont tous le même problème: ils sont incapables d'exprimer leurs sentiments, de respecter des limites et ont des difficultés relationnelles. Ils extériorisent leurs frustrations par la violence. Beaucoup sont hyperkinétiques. 

Nous les aidons à mettre des mots sur leur souffrance, à canaliser leur agressivité et à gérer les crises et ainsi éviter d'entrer dans un schéma de violence. Nous leur apprenons à avoir confiance en eux, à ne plus s'identifier à l'échec, à respecter des limites ainsi que les règles de la vie en société.

Comment se passe une journée de travail ? 

Ma journée commence à 15h30 et se termine à 22h30. La première équipe commence à 7h30 avec le lever et le petit déjeuner. Les enfants vont ensuite à l'école. Ils sont confiés à leur unité pédagogique composée d'un éducateur, d'un instituteur et d'un psychologue. A 16h15, une fois l'école terminée, c'est mon équipe qui prend le relais. Nous prenons une collation et continuons par des activités jusqu'à 18h30 (football, salle de sports, plaine de jeux, etc.). 

Il ne s'agit pas simplement d'occuper les enfants mais aussi de leur apprendre des tas de choses : jouer au football, par exemple, nécessite le respect d'un ensemble de règles. Viennent ensuite les devoirs, le repas, la douche et ensuite le moment du coucher. Je travaille une nuit toutes les deux semaines.

Qui sont vos principaux collaborateurs ?

Nous travaillons en équipe au sein de l'internat mais également avec une équipe médico-sociale : l'assistant social avec lequel nous décidons d'un projet de travail pour l'enfant et sa famille, le thérapeute s'il y a lieu, l'éducateur scolaire, l'instituteur. Nous avons également des liens avec le juge dans le cas d'une décision judiciaire.

Pourquoi avez-vous choisi ce métier ?

J'aime le contact avec les enfants. Les enfants en difficulté m'émeuvent et je voulais faire quelque chose pour eux.

Quelles sont les difficultés de ce métier ?

Conserver son calme, le contrôle de soi-même. Rester stable et logique, toujours garder la même attitude et le juste milieu. Je ne dois être ni trop stricte, ni trop affective. Je ne suis ni leur copine ni leur sœur et encore moins leur mère, mais il y a malgré tout un lien qui se tisse parce qu'ils ont besoin d'affection et de confiance. Le tout est de ne pas aller trop loin pour ne pas briser quelque chose quand ils s'en vont.

Mes horaires me décalent de la vie sociale : mes amis finissent de travailler quand je commence et vont se coucher quand je termine. Le stress est omniprésent parce que ces enfants recherchent le conflit. Alors même si on est d'un naturel calme et posé, il y a des moments où c'est plus difficile.

Ma recette ? Décompresser dès que je le peux, en faisant une petite pause de cinq minutes dans la salle des éducateurs ou lors de la réunion quotidienne d'évaluation avec toute l'équipe. Et dès qu'une situation me préoccupe, j'en parle avec mes collègues, mes amis, ma sœur. J'essaie ainsi d'évacuer le problème, de trouver des solutions, de relativiser.

Quels sont vos parcours scolaire et professionnel ? 

J'ai fait un bachelier d'assistante en psychologie à l'institut libre Marie Haps. Lors de mon stage dans un centre de guidance, j'ai été en contact avec des enfants primo-délinquants. J'ai voulu comprendre comment et pourquoi ces enfants en arrivaient là. J'ai donc fait une année passerelle en droit suivi d'un master en criminologie.

Je dois encore remettre mon mémoire.

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.