Mr Devrim Gumus,
Directeur-gérant, Le Logis Tournaisien

Interview réalisée en janvier 2019

Quelle est votre formation ? Pouvez-vous nous parler de votre parcours scolaire ?

Après des études de secondaires générales, j’ai suivi une formation d’Ingénieur civil architecte à la Faculté Polytechnique de Mons. J’ai été diplômé en 2004.

Quelles ont été vos expériences professionnelles ?

Avant de travailler pour le Logis Tournaisien, j’étais fonctionnaire à la ville de Tournai en tant que responsable du service des travaux. Je m’occupais de la gestion communale du domaine public (trottoirs, bâtiments, espaces verts, cimetières, ramassage des déchets, etc.). Auparavant, j’avais exercé en tant qu’ingénieur de projet dans un bureau d’études bruxellois. Je travaillais sur des projets immobiliers (crèches, homes, bureaux, etc.). J’ai également été employé par un bureau d’architecture et un bureau d’études en stabilité.

Pouvez-vous présenter en quelques mots le Logis Tournaisien ?

Le Logis Tournaisien est né en 1922. C’est une des 62 Sociétés de Logements de Service Public (SLSP) de Wallonie. Nous gérons un patrimoine de 2200 logements répartis sur l’ensemble du territoire tournaisien. Nous attribuons des logements aux personnes qui répondent aux conditions déterminées par le Code Wallon du Logement et de l’Habitat Durable et nous entretenons ce patrimoine de logements.

En quoi consiste votre travail ? 

Je suis directeur-gérant depuis un an et demi. Je suis encore relativement jeune dans la fonction. Au quotidien, le directeur-gérant s’occupe des courriers entrants et signe les courriers sortants. Bien sûr, ce n’est pas juste signer les courriers ! Le directeur-gérant établit la stratégie de communication par rapport au message qu’il veut faire passer. Ce matin, par exemple, j’ai signé tous les retards de loyer car nous sommes le 11 du mois. En effet, à partir du 10 du mois, les gens qui ne paient pas le loyer sont considérés en retard de paiement. 

Il y a deux semaines, j’ai fait les propositions de logements. Tous les mois, nous avons une commission d’attribution lors de laquelle on attribue aux personnes ayant des points de priorité les logements qui se sont libérés. Les logements se libèrent au fur et à mesure des évènements de la vie des personnes qui y habitent. Une dizaine de logements par mois sont ainsi réattribués à de nouveaux locataires. On est en contact avec plus de 5500 locataires. Nos missions sont à la fois la gestion et l’entretien de notre patrimoine, mais également le développement du parc locatif. Nous gérons donc des projets immobiliers sur le territoire de Tournai pour agrandir et créer de nouveaux logements. Cela implique une connaissance du marché immobilier de la région et également une connaissance technique des dossiers et de la législation en vigueur. On doit donc continuellement se former. 

Nous avons 1500 candidats locataires qui attendent une habitation. Dans mon quotidien, je reçois parfois des candidats impatients ou qui ne comprennent pas les règles d’attribution des logements qui sont assez strictes, notamment en termes de points de priorité. Je leur explique la règlementation et les informe qu’en modifiant telle ou telle chose dans leur candidature, ils pourraient peut-être avoir un logement plus rapidement. Lorsqu’un candidat ne cible qu’une maison avec un jardin, qui ne représente que 25% de mon parc immobilier, cela réduit ses chances d’obtenir un logement rapidement. Donc, je lui conseille de solliciter également une maison sans jardin ou un appartement, si c’est possible pour lui. C’est l’aspect plus pédagogique du métier. 

En gestion journalière, il y a également tout ce qui concerne les bons de travaux pour les ouvriers (par exemple, s’il y a un problème avec le châssis d’une habitation, une porte de garage qui ne se ferme plus, etc.). Je m’occupe également de tout ce qui est vérification des factures et du suivi des contrats de bail.

Par rapport à la gestion immobilière, je prospecte des terrains, je me forme sur les nouvelles règlementations. 

Avec qui collaborez-vous ?

Les relations extérieures sont une part importante de mon métier, que ce soit avec les fournisseurs, les entreprises de construction, les auteurs de projets, notaires, avocats, huissiers. Nous collaborons énormément avec la Société Wallonne du Logement qui est notre autorité de tutelle. Au niveau local, nous sommes souvent en contact avec la ville de Tournai, avec le CPAS, avec des ASBL de type Tremplin 2000 qui font de la reconversion professionnelle, avec l’Agence Immobilière Sociale (AIS) de Tournai, etc. 

Nous travaillons en commission avec différentes institutions, qu’elles soient locales ou régionales. Nous avons également un comité consultatif des locataires et des propriétaires qui occupe une grande partie de mon temps. Ce comité a un avis sur les décisions que prend le conseil d’administration du Logis Tournaisien. Chaque mois, je prépare ce conseil d’administration qui est la seule autorité qui peut prendre les décisions d’ordre stratégique. Je ne décide donc pas seul, mais fais des reportings auprès du conseil d’administration. Ce n’est pas parce qu’on est directeur qu’on décide de tout !

Quelles sont vos conditions de travail ? 

J’occupe une fonction pour laquelle il n’y a pas d’horaire. Mon contrat de travail n’en prévoit pas. Par exemple, j’interviens lors des conseils d’administration mensuels, le mardi soir. Les commissions d’attributions se réunissent tous les lundis midi. Il y a parfois des manifestations organisées par des associations de quartiers le samedi. Il faut donc être flexible. La représentation du Logis Tournaisien, que ce soit au sein des institutions ou auprès des associations, fait partie de mes missions et je le fais avec plaisir.

Je me déplace fréquemment sur des chantiers sur lesquels il y a des problèmes techniques à résoudre, chez les locataires pour vérifier ou attester des problèmes qu’ils rencontrent, etc. Certaines personnes demandent que je passe chez elles, d’autres viennent à mon bureau. Par ailleurs, je me rends souvent à l’Hôtel de Ville de Tournai ainsi qu’à Charleroi où se trouve la Société Wallonne du Logement. Je me déplace donc au quotidien et dois être assez mobile. Cependant, le travail de bureau reste conséquent. Par rapport à tous les autres métiers que j’ai exercé, mon métier actuel est le plus sédentaire.

Selon vous, quelles sont les qualités requises pour exercer ce métier ?

Les compétences acquises pendant les études sont importantes. 70% de mes interventions sont d’ordre du technique (comprendre la cause d’une infiltration d’eau, de problèmes acoustiques, etc.). Ensuite, je dirais que le métier de directeur-gérant, c’est avant tout de la gestion de ressources humaines. Je dois être à l’écoute des 50 membres du personnel du Logis Tournaisien et savoir trancher quand c’est nécessaire. Malgré des budgets qui diminuent, je dois être capable de motiver mon équipe et de trouver les moyens de renforcer celle-ci. Je gère et je suis des plans de carrière. J’accompagne toute une série de collaborateurs qui souhaitent évoluer dans la société. Tout cela en respectant à la fois les procédures qu’on essaie de mettre en place et la vie privée de chacun. J’insiste toujours sur le fait qu’il y a un côté d’écoute et de gestion sociale dans ce métier. Avant d’être directeur d’une société, on est directeur d’agents. Ce sont les agents qui font que l’on réussit ou non à faire du bon travail. C’est ma manière de voir les choses.

Quels conseils donneriez-vous à quelqu'un qui a envie de se lancer dans ce métier ?

On ne rêve pas de devenir directeur-gérant d’une société de logements. De même qu’on ne le devient pas directement en sortant de l’école. C’est compliqué. C’est plutôt un parcours professionnel qui nous amène vers ce genre de poste. J’ai toujours travaillé dans le secteur technique, puis dans une administration où j’ai fait énormément de gestion de ressources humaines. Cela m’a donné envie de diriger une équipe et d’avoir la capacité d’orienter des stratégies liées aux logements sociaux. Quel est le conseil que je peux donner, c’est de tout faire dans son parcours professionnel pour répondre un jour aux conditions pour postuler à ce job. Le secteur du logement social est un secteur qui peut intéresser beaucoup de jeunes parce qu’il y a à la fois du technique et du social. On a un véritable pouvoir d’action. Par exemple, lorsque deux voisins ne s’entendent pas, on les met autour d’une table pour discuter. On fait du social pour aider les gens à mieux vivre ensemble. Un jeune tenté par mon métier doit avant tout être intéressé par le bien-vivre ensemble et l’aspect social du métier.

Pourquoi avoir choisi ce métier ?

J’ai moi-même habité un logement social quand j’étais enfant, entre 8 et 12 ans. Le jour où le poste de directeur-gérant du Logis Tournaisien s’est ouvert, ma première motivation a été qu’un gamin issu d’un quartier défavorisé puisse devenir directeur d’une société de logements. J’espère que, dans 30 ans, quand je serai pensionné, ce sera une personne issue d’un quartier de logements sociaux qui me succèdera !

 
SIEP.be, Service d'Information sur les Études et les Professions.